Dossier[Tribune] L'e-achat, un marché tiré par l'essor du digital
1 - Les premiers mouvements : d'un marché segmenté vers un marché rationalisé
Le marché, historiquement segmenté entre l'amont et l'aval du processus achats, a vu des pure-players se développer aussi bien sur le S2C que le P2P. Malgré l'arrivée de nouveaux entrants, challengeant les acteurs historiques, SAP semble se maintenir en bonne place.
Estimé autour de 7 milliards de dollars en 2016 par les grands cabinets d'études, le marché mondial des solutions e-achats connaît une croissance régulière depuis une vingtaine d'années. Malgré un trou d'air en 2009-2010 lié à la crise, puis un nouveau ralentissement pendant les années 2012 et 2013, les projets d'informatisation et de digitalisation de la fonction achats continuent de se multiplier : toujours dans les grands groupes, pour renouveler ou compléter les systèmes en place, mais aussi dans les entreprises intermédiaires et les organismes du secteur public, à leur tour en quête de meilleures performances. Cette dynamique s'inscrit dans une montée en maturité globale de la fonction achats. Depuis quelques mois enfin, sous l'effet de la digitalisation galopante des organisations en réaction aux nouveaux acteurs d'intermédiation numérique, les directions des achats sont amenées à adapter leurs pratiques et à tirer parti des nouveaux outils numériques pour gagner encore en efficacité.
Un marché historiquement segmenté
Le marché de l'e-achat s'est historiquement segmenté suivant la couverture des processus amont d'une part (analyse des dépenses, e-sourcing, gestion de la relation fournisseurs, des contrats, de la performance, etc.), regroupant les outils pour les acheteurs, et aval d'autre part (e-procurement, gestion transactionnelle, traitements des factures, paiement, etc.), outils essentiellement destinés aux prescripteurs internes et à la comptabilité fournisseurs. Autrement dit, en considérant le contrat comme pivot : le source-to-contract (S2C) en amont, le contract based procure-to-pay (P2P) en aval.
Le segment du P2P a historiquement été dominé par deux acteurs, l'américain Oracle et l'allemand SAP, en synergie avec leur offre ERP. Le marché a connu un virage important en 2012. Quelques mois après le rachat d'Emptoris par IBM, celui d'Ariba par SAP a en effet changé la donne. Jusqu'alors, en couverture du processus amont source-to-contract, au coeur du métier achats, l'éditeur allemand n'avait pas obtenu les parts de marché ciblées. Ce, malgré les évolutions du module SRM de son offre ERP puis le lancement de SAP Sourcing, une solution métier basée sur la technologie de la société Frictionless, rachetée en 2006.
Les pure-players en force
Pour digitaliser le processus amont S2C, les pure-players restaient la référence. Outre Ariba, le marché français s'est ainsi structuré autour d'éditeurs tels BravoSolution, Ivalua ou SynerTrade, et de taille plus modeste et spécialisés comme Oalia ou Oxalys Technologies, ou, plus proches du modèle de place de marché tel l'américain MFG.com. Mais aussi d'acteurs davantage focalisés sur le volet transactionnel P2P, parmi lesquels B-pack, Basware, Hubwoo et Perfect Commerce. Fidèle à sa stratégie d'offrir une suite fonctionnelle complète, Ivalua s'est par ailleurs développé avec succès et une forte croissance tant sur l'amont que sur l'aval. Au fil des années, et principalement par croissance organique, ces solutions ont réussi à faire leur preuve, gagnant en maturité et en stabilité.
SAP, leader global
Après plusieurs années de rationalisation de ses solutions de gestion des achats et des approvisionnements, et un changement d'organisation, SAP se positionne désormais comme un des leaders globaux de ce domaine. En complément de l'Ariba Business Network interconnectant plusieurs millions de fournisseurs simplifiant et structurant les échanges inter-entreprises, l'intégration des solutions de Fieldglass (achats et gestion de prestations, sous-traitance et interim) et de Concur (achats de voyages et gestion des notes de frais), acquises en 2014, a aussi contribué à cette relance. Cette nouvelle donne, associée à la pénétration de nouveaux entrants en France challengeant les acteurs historiques, tels l'Américain Coupa, a aussi contribué au déclenchement d'une nouvelle vague de restructuration et de consolidation du marché des solutions achats.