Les achats : se réapproprier l'innovation
La direction des achats a en effet tout intérêt à préempter ce rôle d'accompagnateur des start-up dans les entreprises. " Le sujet de l'innovation est l'opportunité pour les directions achats de passer d'un rôle parfois caricaturé, comme celui du "cost killer", à celui de "partenaire et facilitateur de collaboration" ", pense Muriel Monteiro. Car les achats sont bien souvent exclus des processus d'innovation des entreprises, qui sont la chasse gardée des directions innovation. Or, les achats ont différents avantages à apporter au processus d'innovation. La capacité du directeur achats à mener des projets, sa capacité à s'adresser à différentes directions de l'entreprise peuvent tout d'abord en faire la personne idéale pour définir la stratégie à suivre. Mais aussi pour sourcer les entreprises adéquates. " L'identification des fournisseurs est un vrai sujet : le métier de demain des acheteurs est la gestion de tout cet écosystème ", imagine Muriel Monteiro.
Autre qualité : les achats savent très bien gérer les relations avec les fournisseurs. Un pilotage qui doit être fin. " Trimestriellement, voire mensuellement, il faut relever des indicateurs : développement de nouveaux produits, nouveaux clients, levée de fonds, etc. Ce sont des questions que l'on ne se pose pas avec des fournisseurs traditionnels, mais qu'il faut se poser avec des start-up ", conseille Franklin Brousse. Cela permet de ne pas passer à côté d'opportunités, ces petites entreprises innovantes se développant généralement très vite. Un suivi que peuvent faire avec brio les achats.
Mais pour réussir pleinement à ce nouveau rôle, les achats doivent gagner en souplesse. Surtout au niveau de la prise de risques. " Prendre des risques n'est pas forcément grave pour une grosse entreprise, si ces derniers génèrent de la valeur, pense Alberto Buron, expert optimisation achats chez Cylad. Il s'agit donc d'adopter une nouvelle culture au sein de l'entreprise en flexibilisant les risques financiers, les validations de nouveaux fournisseurs... " Revoir ses process permettra de convaincre en interne que les achats ne sont pas des empêcheurs de tourner en rond, mais des partenaires dans les achats en innovation. " Le métier des achats s'est beaucoup professionnalisé autour de processus très structurés. En conséquence, les opérationnels pensent que travailler avec les achats est lourd, long et constitue un facteur de crispation avec les fournisseurs... Les achats doivent donc adapter leur mode de fonctionnement ", observe Claire Etcheverry. " Il faut être moins précis et exprimer le besoin fonctionnel et non plus le besoin technique ", poursuit Caroline Martinot. Il faut aussi que les achats apprennent à aller plus vite : une innovation qui tarde à être mise en place perd tout son intérêt. Et les start up risquent de se lasser.
Bernard Monnier conseille quant à lui de laisser de côté l'aspect coûts pour se focaliser sur la valeur ajoutée. Et souhaite même renommer le directeur achats en gestionnaire de partenariats stratégiques, pour totalement évincer cette notion de cost killing qui colle au nom d'acheteur.
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