Modes et espaces de travail : évolution plutôt que révolution
La crise sanitaire a bousculé les modes de travail avec l'adoption généralisée du télétravail. Les grandes grèves de décembre 2019 avaient à cet égard constitué un test à grande échelle. Une fois la crise passée, plus rien ne sera comme avant. Pour autant, la lame de fond créée par la crise sanitaire ne remettra pas en question la pertinence des immeubles de bureaux. Bien au contraire, la période de confinement convaincra les managers du bien-fondé de ces espaces et de la nécessité pour les collaborateurs de maintenir un contact physique.
C'est donc un scénario médian que nous privilégions entre progression du télétravail d'une part, et consolidation de la place des bureaux comme espaces de sociabilité favorisant le bien-être, la productivité et l'innovation des entreprises d'autre part. Une parallèle peut être fait avec les commerces : de même que le boom du e-commerce a conduit nombre d'enseignes à réduire leur réseau de boutiques au profit des magasins les mieux placés pour optimiser l'expérience client, certaines entreprises pourraient réduire les surfaces qu'elles occupent au profit de bureaux "flagships", aux aménagements plus soignés et situés dans les quartiers les plus prisés. Leur coût plus élevé serait ainsi compensé par la diminution des surfaces occupées, mais aussi par les gains générés en matière de rétention des meilleurs profils, d'amélioration de l'image de l'entreprise, etc.
Par ailleurs, la crise sanitaire majeure qui frappe aujourd'hui le monde pourrait se répéter, et utilisateurs comme bailleurs seront plus attentifs à la gestion des risques, qu'ils soient sanitaires ou environnementaux. Dans ce contexte, la tendance des entreprises à regrouper leurs effectifs au sein de grandes ou très grandes surfaces pourrait-elle s'inverser au profit de stratégies multisites ? Rien n'est moins sûr, les utilisateurs continuant de privilégier la collaboration entre équipes tout en étant plus attentifs à la maîtrise des coûts immobiliers. En revanche, les espaces de travail évolueront pour assurer la sécurité des collaborateurs et la continuité de l'activité en cas de nouveau choc.
Zoom sur le coworking : dynamique freinée
La première conséquence évidente du Covid-19 sera la diminution des surfaces prises à bail par les opérateurs de coworking. Un ralentissement était déjà attendu avant le déclenchement de la crise sanitaire en raison de l'arrêt de l'expansion de WeWork, dont les prises à bail avaient totalisé 50 000 m² sur le seul 1er semestre 2019. Toutefois, la fin de la période de confinement s'accompagnera-t-elle d'une reprise, même moins marquée, de la croissance du coworking ?
Le modèle pourrait de fait profiter du manque de visibilité des entreprises, qui auraient ainsi tendance à recourir au coworking car plus réticents à s'engager sur des baux fermes. Néanmoins, le coworking pourrait pâtir des difficultés économiques des entrepreneurs et des petites entreprises, socle traditionnel de leur activité. Quant aux grands groupes, ils pourraient être tentés de rapatrier les équipes installées au sein d'espaces de coworking pour alléger leurs coûts immobiliers à court terme et peut-être pouvoir mieux contrôler la sécurité de leurs collaborateurs tant que la crise sanitaire n'aura pas été définitivement maîtrisée.
S'ajoute à cela la problématique de la non-perception des loyers par les opérateurs de coworking. Dans ce contexte, certains seraient contraints de mettre un terme aux négociations en cours, voire de libérer des surfaces. A plus long terme, nous privilégions toutefois un scénario médian, entre poursuite du succès du coworking en raison de tendances structurellement favorables d'une part, et concentration plus marquée du secteur au profit des opérateurs les plus solides d'autre part.
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