Les acheteurs publics, au coeur de nouvelles pratiques
Longtemps pointés du doigt en raison d'un cadre global de fonctionnement trop rigide, les achats publics semblent être entrés dans une nouvelle ère. Témoignages.
Je m'abonnePourquoi de nombreux bons professionnels rejoignent-ils désormais les achats publics ? Qu'est-ce qui est différent dans l'achat public ? Comment les achats publics ont-ils évolué changé ? C'est autour de ces questions de fond que les anciens du MAI réunis au sein de l'AAMAI (Association des diplômés du management des achats internationaux & innovation) et Kedge Alumni se sont retrouvés fin novembre, à Paris.
Tous les responsables achats évoluant dans la sphère publique semblent s'accorder sur le fait qu'une des mutations récentes majeures porte sur les critères de performance qui s'invitent massivement dans les processus et prises de décisions. "On peut dater ce basculement au milieu des années 2000. Sous l'influence des pratiques du secteur privé, celles du public ont rapidement évolué pour se répandre aujourd'hui dans de nombreux domaines de la vie publique", constate Olivier Wajnsztok, président de l'AAMAI et directeur associé du cabinet AgileBuyer. "La conformité a toujours été le critère premier dans les achats publics. Aujourd'hui, on évoque beaucoup plus systématiquement des éléments de performance, les calculs de TCO", illustre Fabrice Picardi, directeur achats du Conseil Régional Centre Val de Loire.
De nouveaux défis se présentent ainsi aux acheteurs publics, et viennent se greffer sur des spécificités de travail parfois bien loin du contexte du secteur privé. La possibilité de travailler sur le long terme est systématiquement citée comme un critère qui s'oppose au monde classique des entreprises. "Au sein des directions achats, les visions court-termistes sont un vrai problème dans les sociétés privées, en particulier lorsqu'elles sont cotées", souligne Olivier Wajnsztok.
Les relations avec les fournisseurs sont également décrites comme différentes car plus pérennes. "Au-delà de la violence que représenter la bataille dans le cadre des appels d'offres, les fournisseurs représentent de véritables relations partenariales de long terme", souligne Fabrice Picardi.
De la contrainte à l'agilité
Bien sûr, les acheteurs publics ont à exercer leur métier dans un cadre particulier où de règles doivent être respectées. Mais celui-ci peut aussi être source de valeur ajoutée. Au-delà du volet contraignant, les principes de la commande publique, les directives européennes, les réglementations spécifiques, les priorités politiques sont un préalable indispensable synonyme de garanties pour l'intérêt général. "Une directive européenne peut parfois être interprétée de différentes manières. Des discussions étroites avec les juristes s'avèrent dès lors indispensables. Ces derniers approuvent nos décisions à plusieurs reprises et interviennent ainsi au niveau du choix du fournisseur, du choix du contrat", indique Dominique Etourneau, directeur achats de Aéroport de Paris.
Ce contexte spécifique n'empêche pas les achats publics de devenir de plus en plus agile, une des autres grandes mutations de la fonction achats à laquelle on assiste aujourd'hui. De nouvelles méthodologies se mettent en place et impliquent de réinventer les organisations achats, de simplifier les processus achats, d'adapter les compétences des acheteurs et de modifier la structure des contrats élaborée autour de principes de flexibilité. L'idée est aussi de permettre d'assurer la cohérence relative au besoin du client dans les meilleures conditions, tout en réduisant les délais d'acquisition.
Les participants au débat. De gauche à droite: Olivier Wajnsztok (AAMAI), Dominique Etourneau (ADP), François Maurage (SNCF Réseau), Wilfried Boudas (UGAP), Fabrice Picardi (Région Centre Val de Loire) et Justine Ganseman (Andra).