Bien assurer son déménagement d'entreprise
Un déménagement est coûteux pour les entreprises. Transfert de siège social, d'archives ou de matériel industriel, les sociétés doivent pouvoir décrypter les contrats d'assurance pour parer à toute éventualité en cas de dégradation des biens. Explications.
Je m'abonne«Les contrats d'assurance pour les déménagements d'entreprise sont très bien bordés. Mais les acheteurs ont encore une certaine méconnaissance de ceux-ci», constate Kévin Manchon, directeur général de la société de déménagement Demepool. Bien assurer son déménagement d'entreprise est un sujet délicat. Et décrypter les contrats d'assurance est souvent un casse-tête. D'une manière générale, les entreprises de déménagement ont l'obligation légale d'intégrer dans leurs conditions générales de vente (CGV) une assurance des marchandises transportées, avec un forfait par unité ou m3 déménagé. C'est ce que l'on appelle la responsabilité contractuelle du prestataire. Ainsi, la société de transport Euroflash précise dans son contrat une garantie pour le matériel et les machines d'un montant de 8000 euros maximum par unité confiée, 152500 euros par véhicule et 300000 euros par événement. Et propose une garantie de 226 euros par m3 pour le mobilier de bureau, les documents et les archives. Chez Demepool, le tarif pratiqué est de 13 euros par kilo par machine (avec un maximum de 13000 euros par unité) et de 228 euros par m3.
L'entreprise de déménagement est en revanche limitée en montant d'indemnisation par ses CGV. Libre au déménageur d'améliorer ces dernières. «Nous indemnisons les marchandises à hauteur de 53000 euros maximum. Si une entreprise déménage des serveurs informatiques coûteux par exemple, nous lui conseillons de souscrire une garantie dommage», précise Kévin Manchon (Demepool). Ce dernier affirme que «trop peu d'acheteurs souscrivent la garantie dite «ad valorem» (sur la valeur) et le regrettent ensuite». Cette garantie dommage sur valeur déclarée («ad valorem») permet de déplafonner les montants indiqués dans les CGV de l'entreprise de déménagement. Elle varie en fonction de la valeur déclarée par l'entreprise ayant recours au prestataire. Une information importante à retenir, comme le souligne Kévin Manchon: «Les entreprises doivent bien déclarer leurs biens car, en cas de dommage, elles seront remboursées sur la valeur déclarée. » Ainsi, en cas d'erreur dans la déclaration, si la valeur des biens estimée est supérieure à celle déclarée, un expert sera requis et, dans le cas inverse, l'entreprise cliente y perdra, car elle ne sera remboursée que sur le montant déclaré. Chez Demepool, les amortissements sont pris en compte. Ainsi, les biens évalués le sont en fonction de leur vétusté et leur décote influe sur le taux de remboursement. La souscription à cette garantie dommage est proposée pour un supplément tarifaire variable. A titre d'exemple, il oscille entre 0,2 et 0,5 % selon le montant total des biens déclarés chez Demepool. De son côté, la société Euroflash fixe une prime au cas par cas.
Kévin Manchon
Kévin Manchon, Demepool
« Les entreprises doivent correctement déclarer leurs biens car en cas de dommage, elles seront remboursées sur la valeur déclarée. »
Faire attention à la deuxième ligne
Les conditions générales de vente ne font pas mention des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers (comme un ascenseur détérioré pendant le déménagement, une cage d'escalier endommagée, etc.). Pour couvrir les risques non stipulés dans les conditions générales de vente, les transporteurs, dans leur vaste majorité, font appel à une compagnie d'assurances qui leur fournit une attestation d'assurance en responsabilité civile entreprise, intégrant le montant des capitaux garantis (contrat de première ligne). Elle est annexée à leur devis ou contrat. A titre d'exemple, le dédommagement en cas de sinistre peut aller jusqu'à 1,5 million d'euros chez Demepool.
Chez Euroflash, en fonction des dommages, les dédommagements se chiffrent également en millions d'euros. Les sociétés doivent donc se montrer vigilantes et vérifier dans leur contrat « qu il est mentionné que l entreprise de déménagement s'est elle-même assurée auprès d'une compagnie d'assurances», déclare Soumia Achfaa, la secrétaire générale de l'Association française du déménagement d'entreprises (AFDE). Enfin, comme pour la garantie dommage sur valeur, il est possible de déplafonner le montant des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers. Dans ce cas, l'entreprise de déménagement traite alors au coup par coup avec son ou ses assureurs les demandes de dépassement. Ce contrat, dit de deuxième ligne, intervient après épuisement des capitaux assurés par les contrats de première ligne. «Nous le recommandons par exemple pour des transferts industriels », Kévin Manchon, souligne le p-dg de Demepool. Ce déplafonnement peut grimper jusqu'à 3 millions d'euros, voire 4,5 millions d'euros chez certains prestataires. Un montant suffisamment important pour prendre le temps de lire entre les lignes de ces contrats d'assurance.
«Les assureurs des entreprises de déménagement proposeront facilement une couverture d'assurance dommages pour des opérations de déménagements administratifs, mais seront plus frileux pour des déménagements industriels», énonce Soumia Achfaa (AFDE). En général, les assureurs des entreprises de déménagement ne souhaitent pas s'intéresser à une couverture d'assurance dommage avec extension «perte d'exploitation» (article «déclaration d'intérêt spécial à la livraison» Iaux CGV). «Nous recommandons aux entreprises de négocier avec leurs assureurs une couverture d'assurance spécifique en cas d'enjeu financier important et de déclaration d'intérêt spécial. Dans ce cas, l'engagement de l'entreprise de déménagement se limite à sa responsabilité avec application des limitations», conclut Soumia Achfaa.
Soumia Achfaa
Soumia Achfaa, AFDE
«Il faut vérifier que l'entreprise de déménagement est elle-même assurée auprès d'une compagnie d'assurances.»
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Assurances tous risques?
D'une manière générale, les contrats sont dits «tous risques». Les conditions d'exclusion les plus courants sont le vice propre de la marchandise ou du bien (détérioration due à un défaut de construction), le dérèglement du bien (s'il s'agit d'un dispositif électronique), les dommages causés par un tiers et les cas de force majeure.
Court' Dem, courtier en déménagement, pointe d'autres cas d'exclusion comme l'emballage des biens. Ainsi, «si le client s'est occupé de l'emballage d'un objet et qu 'il arrive abîmé du fait de sa mise en carton, si le client indique de mauvaises informations sur le transport d'un objet fragile non signalé comme tel ou si les conditions d'accès au nouveau bâtiment ne sont pas celles décrites sur le contrat de déménagement et que cela occasionne des détériorations, le client ne pourra pas se faire indemniser». Chez Axa, le contrat ne garantit pas le vice propre de la marchandise ou du bien les risques nucléaires, chimiques, biologiques, biochimiques et électromagnétiques. Ni le dérèglement des appareils en cours de transport, la rouille, l'oxydation pour le matériel transporté à nu, les dommages aux têtes de lectures les pertes de données et l'oxydation pour les matériels informatiques... Sont également exclus l'incendie, les dégâts des eaux, l'explosion, les dommages de mouille, le vol et manquants constatés en phase de stockage en garde-meubles. Selon Court'Dem, «la souscription d'une assurance dommage prend généralement en compte les cas de force majeure». Reste à définir le concept de risque majeur.