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La démarche Valeur(s) appliquée aux Achats

Publié par Olaf De Hemmer Gudme le | Mis à jour le

Présentation de l’application du raisonnement Valeur(s) au domaine des Achats, en pleine révolution 'systèmique' pour dépasser la maîtrise des coûts et concilier création de valeur (réduction des coûts, innovation, entreprise étendue …) et respect des valeurs (RSE, gouvernance …).

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La démarche Valeur(s)

L’ouvrage collectif « Valeur(s) & Management : des méthodes pour plus de valeur(s) dans le management »[1] a présenté quelques-unes des dizaines de méthodes mises en œuvre dans divers domaines de l’amélioration de la performance où elles contribuent à ‘créer plus de Valeur(s) dans les entreprises’ : analyse de la valeur, blue ocean, économie de fonctionnalité, éco-conception, lean, valeur utile pour le client, Responsabilité Sociétale d’Entreprise …

Ces méthodes sont basées sur des concepts communs :

  • le raisonnement valeur = utilités / coûts perçus = satisfaction des besoins des parties prenantes / ressources consommées
  • l’approche système où l’on modélise les relations et flux de transformation avec l’environnement, à différents  niveaux
  • une importance donnée au sens et au dialogue avec les personnes concernées ou parties prenantes, autre aspect de la démarche système

Le déploiement d’un raisonnement système, à travers ces méthodes qui l’exploitent déjà avec efficience dans de nombreux domaines de l’entreprise, ouvre à coup sûr des espoirs considérables pour tous ceux qui rêvent de retrouver du sens et de l’humain dans l’économie.

Application à un métier de l’entreprise : les Achats

Prenons l’exemple des Achats : service spécifique de l’organisation ou fonction de l’entreprise historiquement dédiée aux contacts avec les fournisseurs, depuis leur sélection jusqu’à l’acquisition au quotidien des fournitures nécessaires pour fabriquer les produits et services proposés par l’entreprise, et les moyens du fonctionnement de toutes les fonctions.

Après 20 ans de professionnalisation autour de la maîtrise des coûts et de la mondialisation, une révolution est en cours dans les Achats. Celle-ci correspond à une révolution 'systémique' de la raison d'être de l'entreprise : le lieu où des parties prenantes mettent en commun des ressources (argent des financeurs, temps et compétences des employés, produits et services des fournisseurs et partenaires ...) pour servir ensemble les besoins (et envies) des clients et utilisateurs finaux, afin d'en retirer chacun plus (d'argent, de statut social, d'épanouissement...) que ce qu'il y a mis.

Chaque acteur de l'entreprise, les acheteurs comme les autres, sont donc au service de leurs propres parties prenantes –aussi 'internes'- pour participer à la création de valeur(s) pour chacun : les fournisseurs (actuels et potentiels, aussi parties prenantes de l’entreprise), la production, la finance, la R&D, …!

Rôle et performance globale des Achats

On tire de ces éléments une nouvelle façon d’évaluer la performance ‘globale’ des Achats : quelle création de valeur(s) pour leurs parties prenantes ? Celle-ci peut être ‘mesurée’ avec différents niveaux de sophistication, selon la maturité de la démarche :

  • Les Achats ont-ils conscience de devoir satisfaire toutes leurs parties prenantes, internes : utilisateurs des achats (production, employés), ingénierie, finance, R&D, RSE, Direction générale) ? Et que ces rôles supposent des compétences (des acteurs ?) différents ? (approvisionnements, category managers, acheteurs projet, achats amont, achats responsables, direction achats …) 
  • Et aussi de devoir satisfaire leurs parties prenantes externes : les fournisseurs ? (et non pas seulement d’en tirer le maximum)
  • Les Achats connaissent-ils les attentes de leurs interlocuteurs ?
  • Quelle satisfaction les acteurs en contact avec les Achats tirent-ils de leur relation ?
  • Existe-t-il des indicateurs, des processus, des outils pour formaliser ces attentes et mesurer leur satisfaction ?
  • Le processus d’achats est-il géré par les Achats seuls, ou porté par un processus impliquant tous les acteurs de la conception et de la réalisation des produits/services de l’entreprise ?
  • Comment les Achats sont-ils perçus par la Direction ?
    • un acteur opérationnel,
    • un porteur du résultat opérationnel (coûts),
    • un vecteur de compétitivité à moyen terme (profit, innovation, RSE),
    • un participant à la stratégie de l’entreprise (entreprise étendue, supply chain intégrée, économie circulaire, business model partagé avec les fournisseurs …)

Indicateurs de progrès : coût(s) ou valeur(s) ?

Concrètement, ce changement de point de vue ‘systémique’ des Achats amène à compléter les types d’actions confiées aux Achats : la réduction des coûts d’achats, certes, mais aussi améliorer les solutions pour mieux servir les clients, utilisateurs et autres parties prenantes :

  • le prix d’achat est évidemment important, mais pas au détriment de la qualité des fournitures ! Le Redesign-To-Cost vise la meilleure solution à prix donné.
  • pas non plus aux dépens de la pertinence de la solution : les fournisseurs potentiels ont-ils proposé la meilleure des solutions ? L’analyse de la Valeur permet de revisiter la conception des composants achetés, en collaboration avec les responsables internes de la conception des produits –Ingénierie et R&D- et les interlocuteurs des clients –Commercial et Marketing.
  • le prix de revient des produits/services de l’entreprise inclut des achats de fournitures et de ‘sous-traitance’[2] mais aussi leur transformation dans l’entreprise. Les solutions des fournisseurs sont-elles les plus efficaces pour limiter ce coût de transformation –énergie, main d’œuvre, machines, transport…-
  • l’efficacité des employés est aussi dépendante de la qualité et du confort des outils mis à leur disposition, voire de la motivation qu’engendre leur usage : les Achats ‘indirects’ sont aussi facteurs de productivité ! La réflexion Valeur(s) doit aussi être menée avec d’une part, la Production et la Logistique et d’autre part les Services Généraux.
  • Des innovations sur les produits, les services attachés, le business model de sa commercialisation sont-elles possibles, à partir des solutions développées par des fournisseurs ? Ceux-ci les réserveront-ils à l’entreprise ou la partageront-ils avec des concurrents ? Des démarches d’économie de fonctionnalité et d’économie circulaire sont possibles. Les Achats collaboreront avec Marketing et R&D mais aussi la DAF pour conserver une longueur d’avance sur les futurs marchés.
  • la Production recherche en permanence des voies de progrès : comment améliorer les machines et outils des processus sans les fournisseurs et les Achats ? Le Supplier Development vise à améliorer ses fournisseurs pour rester plus compétitif.
  • où installer de nouvelles capacités de production pour de nouveaux marchés géographiques ? Faire / faire faire,  acheter /louer des équipements / des prestations / des résultats … ? Ces décisions stratégiques supposent un rôle de professionnels des Achats, mais les compétences requises ne relèvent pas forcément d’acheteurs ou pas des mêmes selon les rôles?
  • la performance de la Production est aussi victime sujette à des risques : rupture de flux d’approvisionnement, faillite de fournisseur, risque de change, image d’un fournisseur défaillant … Les Achats visent désormais le ratio coûts/bénéfices*risques.
  • à un niveau plus stratégique, comment élargir la maîtrise en amont et aval de leur chaîne de valeur. L’interdépendance avec les fournisseurs (et les distributeurs) suppose de manager l’entreprise étendue ?
  • la Finance cherche à améliorer les coûts d’achats mais néglige souvent d’impliquer  les Achats dans les achats les plus importants : les investissements ! De belles synergies sont possibles en appliquant les méthodes Valeur(s) sur les CapEx.
  • la Finance a également d’autres objectifs que les montants des dépenses : la trésorerie, impactée par les immobilisations (stocks et investissements) et les délais de paiements des fournisseurs impliquent les Achats !
  • la santé financière des fournisseurs est importante pour l’entreprise, qui dépend d’eux (au moins certains) pour sa survie et sa compétitivité.
  • les utilisateurs engagent aussi d’autres dépenses pour mettre en œuvre le produit/service de l’entreprise : énergie, temps et main d’œuvre, … Il est possible de limiter le Coût Complet de Possession, en innovant avec des fournisseurs.
  • les coûts perçus par les clients ne sont pas que financiers : temps, effort, impact environnemental, impact social et territorial, image, éthique … peuvent être des cibles des efforts de la Direction Générale, qui confiera à des Achats Responsables la responsabilité de maîtriser la responsabilité des fournisseurs et idéalement la réflexion sur l’innovation responsable.

Les Achats sont peut-être la fonction de l’entreprise la plus en pointe de ses évolutions vers le management de l’entreprise étendue et responsable. Mais leur cahier des charges s’alourdit … Heureusement, ce processus est d'abord affaire de collaboration avec les autres fonctions de l'entreprise !

 

[1] “Valeur(s) et management : des méthodes pour plus de valeur(s) dans le management” O. de Hemmer Gudme and H. Poissonnier, EMS Editions, 2013

[2] Quel vilain terme, si peu respectueux de l’importance de certains prestataires pour la qualité !

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Olaf De Hemmer Gudme

conseil en Management Valeur(s)

Olaf de Hemmer, conseil en management et formateur depuis 25 ans travaille depuis 15 ans à la ‘création de valeur(s)’ dans différents domaines [...]...

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