Voyages d'affaires: les PME optimisent leurs coûts
En 2006, les PME françaises ont dépensé 7,7 MdEuros pour leurs voyages d'affaires. Ce marché suscite la convoitise des agences, qui bâtissent des offres spécifiques. L'augmentation de la réservation en ligne et la mise à disposition d'outils complets de reporting permettent d'optimiser cette famille d'achats.
Je m'abonneLes collaborateurs de PME voyagent beaucoup. Une tendance relevée par le baromètre EVP 2006 d'American Express voyages d'affaires. Les PME françaises dépensent environ 7,7 milliards d'euros en frais professionnels, ce qui inclut l'ensemble des dépenses de voyages, de déplacements, de missions et de réceptions (VDMR). Ce chiffre représente 30 % des dépenses globales des entreprises françaises, qui s'élèvent à 25,7 milliards d'euros. «Vu le tissu économique français, où les PME sont majoritaires, le potentiel de développement de ce marché est considérable», analyse Marie- Liesse Douroux, directeur business développement d'American Express Voyages d'Affaires pour la France. Toujours selon American Express, 50 % des dépenses de transport dans les PME concerneraient le rail, 30 % les billets d'avion pour la France, et 20 % les billets d'avion internationaux.
Fort de ce constat, Amex va affiner son offre en lançant au second semestre 2007 un nouveau portail dédié aux PME, baptisé Easy Res Plus. «Par rapport aux grands comptes, les salariés des PME se déplacent moins souvent dans l'année, et rarement en groupe, reprend Marie- Liesse Douroux. Les occasions de réaliser des économies en jouant sur le volume ou le nombre de déplacements sont donc moins fréquentes. D'où l'importance du prix unitaire du voyage. Les PME sont très sensibles à la recherche du meilleur prix, quitte à être infidèles au voyagiste. Il s'agit de leur offrir le maximum d'éléments de comparaison: plusieurs possibilités de transport ou de parcours pour une même destination, et plusieurs tarifs. En matière d'hôtellerie par exemple, un grand compte a sa politique propre, qui peut consistera ne vouloir que du 5 Etoiles. Les PME sont plus pragmatiques. Elles veulent avoir accès à nos tarifs négociés pour les hôtels, mais elles demandent aussi à ce qu'ils soient proches du lieu de travail ou de rendez- vous du lendemain.»
Floyd Widener, Carlson Wagonlit Travel
« Les PME ont toujours besoin de conseils pour l'élaboration d'un voyage complexe ou l'interprétation d'un reporting...»
L'accès aux tarifs négociés des agences de voyages est un premier pas vers l'optimisation des coûts. Ces économies constituent l'un des éléments principaux de la définition d'une politique de voyages d'affaires pour les moyennes entreprises. Un processus où les services achats ont une carte à jouer. Dans les petites structures clientes, la gestion des voyages, qui était auparavant dévolue aux secrétaires ou aux assistantes de direction, voire aux services généraux, bascule parfois entre les mains du directeur financier ou d'un responsable achats. Ces derniers sont également les principaux destinataires du reporting.
La mise en place de règles
Autre tendance relevée par le baromètre EVP 2006, près de 58 % des PME ont mis en place une politique voyages. «Les PME sont de plus en plus nombreuses à définir, sinon une politique, des règles applicables à leurs déplacements», témoigne Jérôme Fouque, directeur commercial d'Expedia Corporate Travel. Ce dernier reçoit parfois ces éléments «par fax, sur de simples feuilles A4!» Ce chiffre en hausse traduit une volonté de maîtrise des coûts. «Cette famille d'achats est compliquée à rationaliser et à contrôler dans les PME, constate Christian Coulaud, p-dg de Runaworld, une agence spécialisée dans le voyage d'affaires pour les PME/ PMI. Le compte voyages et déplacements est un compte fourre-tout. Il contient aussi bien les dépenses en billets d'avion que la location de voiture ou la note de restaurant, et il peut rarement être géré a priori.»
En conséquence, le rôle de l'agence de voyages a évolué. Les PME demandent plus que le simple accès à des tarifs négociés. «Depuis deux ans, nous sommes fortement sollicités pour du conseil. Il s'agit d'aider à identifier les leviers nécessaires pour gérer et optimiser le budget voyages», observe Floyd Widener, vice-président ventes EMOA de Carlson Wagonlit Travel (CWT). En 2006, le voyagiste a lancé CWT Connect, son portail dédié aux voyages d'affaires des PME. «Afin de s'adapter aux spécificités de cette clientèle, notre offre est déclinée en deux parties: CWT Connect Express, qui s'adresse aux petites entreprises dépourvues de politique en matière de voyages, et CWT Connect Business, qui a été conçu pour les moyennes entreprises dotées d'une politique et d'accords négociés avec les fournisseurs.»
Expérience
Henri maire se dote d'une politique voyages
Implantée à Arbois, dans le Jura, la société Henri Maire (producteur et négociant en vin), qui compte environ 500 collaborateurs, dispose notamment d'un bureau à Paris où la direction générale et l'encadrement commercial font des allers-retours fréquents en train.
Auparavant, la prise de commandes était effectuée par le secrétariat de direction. Pierre-Louis Valot, acheteur, a récupéré ce budget d'environ 3000 euros annuels à partir de juillet 2006. «L'objectif était avant tout d'optimiser la prise de commande en identifiant les utilisateurs récurrents.» Il a ainsi ouvert un compte au nom de l'entreprise sur l'Espace Pro de Voyages SNCF, un service dédié aux PME. En tant qu'administrateur unique, celui-ci a créé et défini les comptes utilisateurs, qui permettent de passer les commandes en ligne. La politique de voyages, comprenant notamment les budgets autorisés, s'affiche systématiquement lors des connexions sur les comptes utilisateurs. «En général, les commandes sont passées suffisamment tôt pour recevoir les billets par voie postale. Dans le cas contraire, deux autres options sont possibles: l'impression et le retrait en gare», précise ce dernier. La rationalisation s'est opérée à plusieurs niveaux. Le paiement s'effectue par le biais d'une carte de crédit unique, au nom de Pierre-Louis Valot. «A chaque nouvelle commande, je reçois un accusé de réception par mail, ce qui évite les fraudes éventuelles. De plus, j'accède au compte en ligne, avec les voyages en cours de chaque collaborateur. Le récapitulatif des commandes m'est envoyé mensuellement. Le pointage est ainsi facilité pour la comptabilité et les utilisateurs ne sont plus obligés de conserver les justificatifs papier de leurs déplacements.» Une optimisation qui s'est réalisée en douceur, grâce à la facilité d'utilisation du service.
L'accès à des outils de reporting
De son côté, la SNCF a lancé son offre dédiée en 2006, baptisée «Espace Pro». Près de 92 % des utilisateurs de cet espace, soit 3 300 PME pour environ 3500 voyageurs, comptent moins de 50 salariés. «Le service est géré dans l'entreprise par un administrateur désigné, qui crée les comptes utilisateurs et enregistre les voyages récurrents, explique Louis Brosse, directeur marketing et ventes de Voyages SNCF. Dans ce cadre, les collaborateurs sont ensuite autonomes pour passer leurs commandes. A chaque connexion, les éléments de la politique voyages qu'ils doivent prendre en compte apparaissent.» La considération de la politique voyages interne lors de la réservation est un élément essentiel pour les PME où, à la différence des grands comptes, l'acheteur est dans la majorité des cas le consommateur. Expédia propose ainsi la mise à disposition d'un site internet privatif et sur mesure de réservation. «Ce site est directement paramétré avec les éléments de la politique voyages de la PME, note Jérôme Fouque (Expédia). Ainsi, le voyageur ne pourra passer commande que dans le cadre de la travel policy. Mais il disposera d'une quinzaine de propositions, afin de faire un choix intelligent.»
La réservation en ligne connaît ainsi un succès grandissant dans les PME. Une migration encouragée par la qualité des outils de reporting, qui séduit le client potentiel. «Il s'agit de mettre en place un moyen de contrôle efficace de la performance, relève Christian Coulaud (Runaworld). Nous devons fournir des statistiques et des rapports d'utilisation consultables à tout moment, exploitables directement par le contrôle de gestion ou la direction achats. Ils permettent de visualiser les principales sources de coûts et les gisements d'économies dans l'organisation des voyages.» En moyenne, les voyagistes avancent les chiffres de 15 à 20 % d'économies générées lors de la première année d'utilisation des solutions on line. Selon Louis Brosse (Voyages SNCF), «l'optimisation ne s'opère pas seulement au niveau des coûts, même si cela a été le moteur principal pour nos nouveaux clients, qui économisent les frais de dossiers qu'ils versaient auparavant à leurs agences de voyages. Les premiers retours soulignent le gain de temps et la sécurisation des transactions. Pour chaque commande effectuée, un mail récapitulatif est envoyé à l'administrateur, qui peut ainsi procéder aux vérifications.»
Expérience
Diebold s'est converti à la réservation en ligne
Diebold, spécialiste des distributeurs de billets, des solutions de vote et des systèmes de sécurité, compte 180 collaborateurs en France, dont plusieurs effectuent des déplacements professionnels vers l'Europe et les Etats-Unis, avec quelques cas de voyages complexes.
Jusqu'en 2005, cette PME avait des accords négociés avec plusieurs agences de voyages. «Dans une volonté d'optimisation de cette famille d'achats, notamment depuis l'arrêt du commissionnement des agences de voyages par les compagnies aériennes, nous avons choisi de recourir à un seul prestataire, Expédia, pour bénéficier notamment de ses tarifs négociés, explique Valérie Roger, responsable des services généraux de Diebold, qui annonce des premiers résultats très positifs. Nous avons d'ores et déjà réalisé une économie d'environ 20 % au niveau du coût des agences.» La solution du prestataire permet la mise à disposition d'un site Internet privatif pour les réservations. Les collaborateurs de Diebold réservent désormais eux- mêmes leurs propres voyages, dégageant ainsi du temps de travail pour les assistantes de direction qui s'en occupaient précédemment. «L'outil on Une est apprécié par nos collaborateurs, notamment pour sa rapidité et sa commodité: 90 % des voyages d'affaires sont commandés par ce canal, et ce chiffre devrait encore croître», se réjouit Valérie Roger. La responsable des services généraux a par ailleurs opté pour un reporting bimensuel des données concernant les voyages d'affaires. «Cette fréquence me permet de consolider les données et de veiller au respect du budget.» Elle souhaiterait à terme étendre le reporting à l'ensemble des dépenses des collaborateurs. «L'idéal serait de bénéficier de données englobant l'ensemble des dépenses engagées dans le cadre du voyage d'affaires: l'hôtel, le péage, le carburant, etc.» Comme dans la plupart des entreprises, la volonté d'optimisation de cette famille d'achats est permanente.
L'importance du service client
Dans ce contexte d'augmentation de la commande en ligne, la qualité du service off line devient un argument décisif dans l'offre des voyagistes. «Il garantit la continuité de notre service, résume Christian Coulaud (Runaworld). L'entreprise qui adopte notre solution en ligne l'utilisera pour 80 à 85 % des commandes. Tout le reste, les voyages complexes ou multidestination par exemple, est effectué par téléphone ou par mail.» La solution des prestataires se couple ainsi avec un volet back-office de plus en plus complet. Le cas le plus courant est la mise à disposition d'un, voire plusieurs, conseillers voyages dédiés. Les grands voyagistes proposent en outre un service client qui prête assistance avant, pendant et après le voyage, ou un service d'urgence polyglotte, prêt à fournir 24 h/24 et 7j/7 une assistance en toutes circonstances. «La réactivité est essentielle. Nos outils permettent de commander un voyage à la dernière minute. Le client doit pouvoir joindre en permanence son gestionnaire dédié, pour modifier ou annuler sa commande, ou pour ajuster sa politique», ajoute Jérôme Fouque (Expédia Corporate Travel).
Les voyagistes d'envergure internationale mettent également en avant l'atout que représente leur réseau d'agences physiques. Un critère qui entre souvent en ligne de compte pour le choix d'un prestataire unique. «Notre réseau d'agences de voyages de proximité est apprécié, indique Floyd Widener (CWT). Les PME en ont toujours besoin pour du conseil, l'élaboration d'un voyage complexe ou l'aide à l'interprétation d'un reporting.» Ironie de l'histoire, c'est ce même réseau qui avait relayé la demande des PME pour bénéficier d'un service on line dédié.
Marie-Liesse Douroux, American Express
«Les occasions de réaliser des économies en jouant sur le volume sont moins fréquentes dans les PME.»