Propriété intellectuelle: frein ou accélérateur au partage de la valeur?
La part des achats dans la valeur ajoutée croît. Le poids des partenaires privilégiés - les fournisseurs - augmente également. Mais, cette relation n'est pas dénuée d'un certain rapport de force. Des freins qui concernent souvent la propriété intellectuelle (PI). Etat des lieux.
Je m'abonneLes cycles de vie des produits sont de plus en plus courts et leur complexité s'accentue. Les entreprises ont donc besoin de tisser des partenariats pour innover et croître en valeur. Certains fournisseurs intègrent déjà, très en amont, le processus de développement des produits et procédés de leurs clients. S'instaure alors une relation stratégique sur le moyen et/ou long terme entre les deux parties. Il est nécessaire de veiller à ce que ce partage soit «gagnant-gagnant» pour pérenniser la relation. De cette collaboration naissent de nouveaux actifs matériels (machines, etc.) et immatériels (connaissances, etc.). Plus le fournisseur sera intégré tôt plus les actifs immatériels seront importants. Quant à cette notion de partage des actifs, elle fait référence à la propriété intellectuelle (PI). Les résultats, nés directement du projet et communément appelés «foreground», devront être négociés avant le lancement du projet. Sinon, ils risquent d'être source de conflits. Il faut également prendre en compte le «background» (connaissances antérieures au projet) appartenant aux parties, le lister et borner. Gare aussi au «sideground», c'est-à-dire des résultats proches du projet mais pas directement créés par celui-ci. Ainsi, même s'il s'agit d'un projet commun avec un objectif unique, de nombreux actifs seront créés et leurs utilisations (mode de protection, exploitation et règles de confidentialité) devront être discutées car les attentes de chaque partie peuvent diverger. La propriété intellectuelle n'est pas seulement un outil de protection, elle offre de nombreux moyens pour capturer et partager la valeur des projets collaboratifs.
Il est donc important que les négociateurs (acheteurs ou dirigeants) soient formés à son utilisation pour ne pas conclure des contrats impossibles qui seront rejetés par leurs juristes, ce qui impacterait la relation.
L'expert
Arnaud Belladon, chef de projet Innovation pour Tésame (centre européen d'innovation basé à Annecy), est diplômé du master Management de l'Innovation et de la Propriété Intellectuelle de l'Université Lyon I I. Au sein de Tésame, il intervient dans les projets d'innovation collaborative, notamment ceux concernant la coconception client-fournisseur.
zoomUne étude pour identifier les meilleures pratiques
Certaines entreprises utilisent des contrats-cadres mais leur complexité et leur non-modularité sont coûteuses et inefficaces. Il existe peu de travaux sur ces pratiques. Thésame, en partenariat avec le cabinet Winnove (Groupe Grandir) et l'Institut européen entreprise et propriété intellectuelle (IEEPI), devraient lancer fin 2011 une étude pour identifier les meilleures pratiques et améliorer la formation des acheteurs et des fournisseurs dans ce domaine.