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Les points de fidélité des salariés largement convoités

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De nombreux collaborateurs cumulent des points de fidélité lors de leurs voyages d'affaires et les utilisent ensuite à des fins privées. Des points que les directions achats aimeraient bien récupérer dans le but de réaliser des économies substantielles. Plusieurs solutions existent.

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@ Stockbyte

Les compagnies aériennes proposent des programmes de fidélité qui permettent aux voyageurs de cumuler des points en fonction de la distance parcourue et d'obtenir ainsi des réductions sur leur prochain voyage. Cependant, ces programmes ne distinguent pas les déplacements professionnels de ceux effectués à titre personnel. Résultat, la plupart des collaborateurs nomades de l'entreprise cumulent des points lors de voyages d'affaires et les utilisent ensuite pour partir en vacances. Une pratique qui irrite les directions achats des grandes entreprises. Ces dernières considèrent, en effet, que ces points devraient être réutilisés dans un cadre professionnel. «La question est systématiquement abordée par les travel managers, indique Brigitte Jakubowski, directeur de JK Associates Consulting, un cabinet spécialisé dans l'optimisation des politiques voyages des entreprises. Si cette pratique était jusqu'à présent tolérée, la rationalisation des budgets voyages pousse les entreprises à rechercher de nouveaux leviers. L'utilisation de ces points de fidélité en fait partie.»

Il faut dire que l'enjeu n'est pas neutre. «Pour l'un de nos clients, nous avions calculé que le total des points de fidélité acquis par les collaborateurs dans un cadre professionnel était l'équivalent de 3 % du budget voyages de l'entreprise!», illustre Brigitte Jakubowski. Qui plus est, en privilégiant certaines compagnies sur telle ou telle destination à un moment donné, le collaborateur risque de réserver un vol plus onéreux sans se soucier de la politique voyages de son entreprise.

Malheureusement pour elles, les sociétés ne peuvent pas récupérer ces points, ni obliger leurs salariés à les utiliser pour leurs déplacements professionnels. «Les programmes de fidélité sont des contrats intuitu personae, c'est-à-dire entre la compagnie aérienne et le collaborateur en tant qu'individu, indique Brigitte Jakubowski. Ce dernier est donc libre de les utiliser comme bon lui semble.» Les entreprises ne peuvent- elles donc rien faire en la matière? Pas si sûr...

DENIS LACROIX, directeur achats en charge des frais généraux et des études, Saint-Gobain.

DENIS LACROIX, directeur achats en charge des frais généraux et des études, Saint-Gobain.

Témoignage

«Nous avons préféré rappeler les grands principes de la politique voyages du groupe»

Les collaborateurs de Saint-Gobain sont souvent amenés à se déplacer. Rien qu'en Europe, le budget voyages du groupe est de l'ordre de 100 millions d'euros par an. L'utilisation des points de fidélité obtenus lors de déplacements professionnels par les salariés de l'entreprise, à titre personnel, n'est pas inconnue de la direction achats du groupe.
Toutefois, le groupe a décidé de ne pas chercher à récupérer ces points. «Nous avons préféré rappeler les grands principes de la politique voyages du groupe, indique Denis Lacroix, directeur achats en charge des frais généraux et des études chez Saint-Gobain. Dans chaque pays, nous avons des accords avec telle ou telle compagnie, à charge pour le collaborateur de réserver le vol au meilleur coût. L'obtention de points de fidélité à titre personnel ne doit pas être le premier critère de sélection d'un déplacement professionnel.» Chez ce leader de la production et de la distribution de matériaux de construction, le débat semble donc clos.

Saint-Gobain

ACTIVITE: Producteur, transformateur et distributeurs de matériaux (verre, céramiques, plastiques, fonte, etc.).

CHIFFRE D'AFFAIRES 2006: 35 milliards d'euros.

EFFECTIF: 200 000 personnes.

Respecter la politique voyages de l'entreprise

Des solutions existent en effet. La première d'entre elles consiste tout simplement à faire respecter au pied de la lettre la politique voyages de l'entreprise. Si les collaborateurs peuvent choisir leurs horaires de vols, en revanche, ils doivent toujours privilégier les compagnies avec lesquelles l'entreprise a négocié des accords tarifaires sur telle ou telle destination et, au-delà, celles qui proposent les meilleurs prix. «D'où l'importance du circuit de validation, précise Anne-Laure Gogeon, consultante au sein du cabinet spécialisé dans les achats hors production Epsa Groupe. Si le collaborateur a privilégié un vol qui n'est manifestement pas le moins cher, l'approbateur, c'est-à-dire le travel manager de l'entreprise ou le supérieur hiérarchique, peut l'obliger à utiliser une autre compagnie.» Ici, la problématique des points de fidélité est, en quelque sorte, contournée. L'approbateur doit demander au salarié de s'expliquer et, le cas échéant, le rappeler à l'ordre. «En général, le collaborateur invoque des fausses bonnes raisons: des horaires inadaptés, des problèmes de sécurité, de confort, etc. Mais la question des points de fidélité n'est jamais évoquée!», confie Anne-Laure Gogeon.

Une autre solution est, au contraire, de prendre acte de l'utilisation des points de fidélité, mais de rappeler expressément aux salariés que la réservation d'un vol doit être réalisée en fonction des critères définis par la politique voyages de l'entreprise, et non selon l'adhésion à tel ou tel programme de fidélité, souscrit à titre personnel. Dès lors, il appartient une nouvelle fois au travel manager de vérifier que la réservation a été effectuée dans les règles de l'art au moment de sa validation.

Enfin, certaines entreprises ont opté pour une solution beaucoup plus radicale. «Une technique utilisée dans les grandes entreprises consiste à revoir la politique voyages sur certains vols et privilégier les réservations en classe économique, explique Brigitte Jakubowski. Si le collaborateur veut voyager en classe business, il lui appartient d'utiliser ses points de fidélité pour se surclasser!» Cette pratique a connu plus ou moins de succès.

CAROLINE ESTIVALS, directeur achats, Novartis France.

CAROLINE ESTIVALS, directeur achats, Novartis France.

Témoignage

«Si le collaborateur choisit un autre vol que ceux proposés, il doit invoquer une raison valable»

Le montant total des voyages d'affaires de Novartis France représente un budget d'environ 5 millions d'euros par an. L'utilisation des points de fidélité acquis lors de déplacements professionnels mais utilisés dans un cadre personnel n'a pas échappé à la direction achats de l'entreprise et à son directeur, Caroline Estivals: «Nous nous sommes demandés comment nous pouvions récupérer ces points. Malheureusement, comme il s'agit de contrat souscrit à titre personnel, nous ne pouvions rien faire, d'autant que le sujet s'est révélé très sensible», confie-t-elle. Pour les salariés de l'entreprise, pas question en effet de revenir sur ce qu'ils considèrent comme une sorte d'avantage en nature. Cependant, la direction achats de Novartis France ne s'est pas avouée vaincue. «Nous avons mis en place un outil de réservation en ligne qui permet d'accéder aux tarifs négocies par la direction achats, détaille Caroline Estivals. Si le collaborateur choisit un autre vol que ceux proposés par l'outil, il doit invoquer une raison valable.» Autant dire que le choix d'une compagnie selon l'obtention de points de fidélité n'en fait pas partie! «En cas de problème, le dossier est directement transmis à la direction executive de l'entreprise», précise Caroline Estivals. Autre mesure: les classes économiques sont privilégiées pour certaines destinations. «Si le collaborateur veut absolument voyager en classe affaires, nous lui répondons qu'il peut utiliser ses points pour se surclasser», intervient le directeur achats. Enfin, pour les hôtels, les salariés disposent désormais d'une carte Accord nominative qui leur permet de cumuler des points et d'obtenir des réductions sur une prochaine réservation, mais uniquement dans un cadre professionnel. «Dommage que les compagnies aériennes ne retiennent pas, à ma connaissance, ce système, regrette Caroline Estivals. Cela leur permettrait pourtant de fidéliser les entreprises.»

Novartis

- ACTIVITE: Groupe spécialisé dans la conception, la fabrication et la commercialisation de médicaments.

- CHIFFRE D'AFFAIRES 2006: 1,375 milliard d'euros.

- EFFECTIF: 2 800 personnes.

 
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Sébastien de Boisfleury

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