Les outils pour des achats publics responsables
Pour intégrer des critères d'achats responsables dans leurs marchés, les acheteurs publics peuvent s'appuyer sur un certain nombre d'articles du code des marchés publics, mais aussi sur des guides pratiques basés sur les retours d'expériences d'autres collectivités.
Je m'abonneAprès le Vélib', voici l'Autolib'. D'ici au 1er janvier 2011, 5 000 véhicules électriques en libre service et 5 000 bornes devraient être mis à disposition du public dans les rues de la capitale et des communes avoisinantes. Le dossier est suivi par un syndicat mixte regroupant toutes les parties prenantes au projet. L'appel d'offres, lancé en décembre dernier, a fait la part belle au développement durable, conformément aux dispositions du code des marchés publics. L'attribution du marché est attendue cet été. A l'image de cet appel d'offres emblématique, la révolution verte est donc bel et bien en marche dans les collectivités et autres institutions publiques. Et sur ce point, les acheteurs publics disposent d'un allié de taille: le code des marchés publics lui-même. Plusieurs articles font plus ou moins directement référence aux critères environnementaux et sociaux. «introduction de clauses sociales dans les marchés publics, qui permettent défavoriser l'insertion professionnelle, est facilitée par l'utilisation potentielle de plusieurs articles du code des marchés publics (articles 14, 15, 30, 50 et 53), confirme David Moore, directeur du pôle public au sein de Factea Sourcing, cabinet de conseil achats. C'est un outil fondamental dont disposent les acheteurs pour participer à la lutte contre l'exclusion. » Les dispositions environnementales et sociales du code des marchés publics sont intégrables à tous les stades de la passation d'un marché. Lors de la définition des conditions d'exécution des marchés, par exemple, l'article 5 permet à l'acheteur public d'intégrer des objectifs de développement durable dès la définition des besoins. De son côté, l'article 6 autorise la fixation de clauses de performance environnementales. «Dans le cadre d'un marché d'externalisation de la flotte automobile du ministère de la Défense, des clauses de performance ont été incluses, illustre ainsi Me Yves-René Guillou, avocat spécialisé en droit public des affaires et dirigeant du cabinet d'avocats éponyme. L'objectif étant la réduction de l'utilisation des véhicules. Des économies financières ont été réalisées mais surtout des économies
Le code, précieux allié pour fixer les critères «verts»
Par ailleurs, les articles 14 et 33 permettent de fixer des objectifs de développement durable et des performances en matière de protection de l'environnement. Au stade de l'examen des candidats, l'article 45 du code offre la possibilité, pendant la sélection des candidatures, d'exiger des opérateurs privés qu'ils présentent certaines garanties techniques pour que le contrat respecte des conditions vertes. Ainsi, pour une commande de papier, l'acheteur public peut exiger un conditionnement en carton de 2 500 feuilles et non en ramettes de 500 feuilles pour réduire le suremballage. Un autre moyen d'intégrer la protection de l'environnement au niveau des spécifications techniques est l'article 50. Dans celui-ci, les offres plus respectueuses de l'environnement seront privilégiées. Des variantes permettent également aux pouvoirs adjudicateurs de répondre à leurs obligations en matière d'insertion. «L'utilisation de cet article est assez innovante. C'est pourquoi il convient d'être attentif à un certain nombre d'informations, comme l'existence d'un lien entre l'objet du marché et l'insertion», rappelle David Moore (Factea Sourcing). Le code intervient aussi au moment de l'attribution du marché avec l'article 53 qui permet aux acheteurs publics de faire peser l'aspect environnemental sur l'ensemble des autres critères. «Dans la restauration collective par exemple, il est possible d'exiger, par une clause d'exécution, que les prestataires utilisent des emballages réutilisables pour les livraisons», indique Me Yves-René Guillou. Toutefois, ce critère vert ne devra pas être formulé de manière à donner un pouvoir discrétionnaire à l'acheteur.
Les guides officiels se multiplient
L'acheteur public dispose également d'outils évoqués dans l'article 132 du code des marchés publics pour l'aider à concrétiser son achat durable. Il s'agit de guides élaborés par des organismes off ciels. Depuis 2003 en effet, les Groupes d'études des marchés de développement durable et environnement (GEM DDEN) en ont déjà publié plusieurs à l'attention des acheteurs. Ils portent sur l'efficacité énergétique, les achats de papier, l'utilisation du bois comme matériau de construction... et sont téléchargeables sur le site internet du ministère de l'Economie et des Finances. Dans la famille des documents off ciels en ligne, on peut également ajouter le site de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et son «Passeport écoproduit» qui encourage les acheteurs à intégrer la protection de l'environnement dans leurs marchés. Une édition disponible sur leur site tient notamment compte de l'évolution du code des marchés publics et des nouvelles opportunités qu'il offre.
Les réseaux, à ne pas négliger
En marge du code des marchés publics, les acheteurs publics peuvent également s'appuyer sur des réseaux off ciels. Objectif: partager les expériences. Le groupe de travail national des réseaux territoriaux «commande publique et développement durable» a créé, par exemple, le site Achatsresponsables.com. Dédié exclusivement aux acheteurs publics, il constitue notamment une plateforme d'échanges de documents sur la commande publique et le développement durable. Chaque acheteur a ainsi la possibilité d'accéder à des documents de référence (guides, synthèses... ), de mettre en ligne et de partager des documents de consultation «responsables», qui pourront ensuite servir à d'autres acheteurs souhaitant intégrer des éléments environnementaux et/ou sociaux dans leurs marchés.
Témoignage
«La ville a imposé le développement durable dans la conscience collective »
La commune de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) a reçu, en novembre dernier, le prix Fimbact qui récompense chaque année la démarche environnementale initiée par une municipalité. Ainsi, le projet de réaménagement du quartier du Chemin-Vert de la ville a été distingué. Il consistait à faire prendre à la commune un tournant plus éco-responsable tout en respectant le code des marchés publics. Ainsi, Boulogne-sur-Mer a mis en oeuvre dans ce quartier des solutions énergétiques performantes et innovantes. « Nous avons créé des citernes enterrées qui récupèrent les eaux pluviales et qui nous servent à arroser les plantes et à laver les trottoirs », explique ainsi Patrick Gens, directeur de l'aménagement urbain de Boulognesur-Mer. Preuve que le code des marchés publics n'est pas un frein à la réalisation de solutions innovantes. Se mettre au vert et faire de l'achat responsable ne sont donc plus des pratiques théoriques et, pour le directeur de l'aménagement urbain de Boulogne-sur-Mer, Patrick Gens, la difficulté réside davantage dans la gérance de ce marché. « La ville a imposé le développement durable dans la conscience collective, se félicite Patrick Gens. En impliquant tous les acteurs de la ville dans ce projet de rénovation, elle a fait le pari d'un engagement clair et responsable au côté de l'environnement. » Un pari gagnant évidemment.
Boulogne-sur-Mer
DEPARTEMENT
Pas-de-Calais
NOMBRE D'HABITANTS
44000 habitants
BUDGET MUNICIPAL 2010
20 millions d'euros