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Les flottes d'entreprise se mettent au vert

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La taxe sur les véhicules de société a changé de mode de calcul depuis le 1er janvier 2006. Fini (ou presque) les chevaux fiscaux, place au CO2. La taxe est désormais évaluée en fonction des émissions polluantes des véhicules. Les gestionnaires de flotte ont dû adapter leur parc en conséquence.

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@ Anthony Bernier

Le nouveau mode de calcul de la taxe sur les véhicules de société (TVS) n'a pas été sans conséquences sur les politiques automobiles des entreprises. Après un exercice 2006 placé sous le signe de l'attente et de l'analyse, l'heure est aujourd'hui à l'action. Il faut dire que certaines notes se sont révélé salées... Depuis le 1er janvier 2006, la taxe spécifique frappant les véhicules de société ne se calcule plus sur la base des chevaux fiscaux, mais sur le nombre de grammes de CO2 émis par kilomètre. Un moyen strict et simple de favoriser les véhicules dits «propres». A titre de comparaison, en 2005, une entreprise payait, pour un véhicule de 6 chevaux fiscaux (CV) émet tant 125 grammes de CO2 par kilomètre, 1 130 euros. En 2006, elle ne s'est acquittée que de 625 euros grâce au nouveau mode de calcul. A l'inverse, alors qu'elle déboursait 1 130 euros pour un véhicule de 7 CV émettant 170 grammes de CO2 par kilomètre en 2005, elle doit désormais s'affranchir d'une taxe de 2550 euros. L'incitation au «rouler écolo» prônée par les pouvoirs publics a, pour les entreprises ne rentrant pas dans le rang, surtout pris les traits d'une augmentation fiscale. Précision qui a son importance: ce nouveau mode de calcul s'applique uniquement aux véhicules acquis après le 1er janvier 2006 et immatriculés après le 1er juin 2004. Les véhicules plus anciens demeurent soumis au régime antérieur, dont les seuils ont été réévalués.

Cette nouvelle TVS, issue de la loi de finances de 2006, n'a pas provoqué le tollé général auquel on pouvait s'attendre. «Hormis quelques remous du côté des opérateurs, notamment les loueurs en longue durée, ce nouveau mode de calcul de la TVS n'a pas fait grand bruit», analyse Olivier Rigoni, fondateur du cabinet de conseil en gestion de flottes automobiles d'entreprises Cogecar. Les entreprises ne se sont pas rendu compte des conséquences. Les premiers temps, elles ont surtout subi ce qui leur arrivait.» Même analyse chez les loueurs de longue durée, principaux interlocuteurs des gestionnaires de flottes. DCS Fleet gérait, fin 2006, 21 796 véhicules en longue durée. Emmanuel Foreau, directeur commercial de cette filiale du groupe Daimler Chrysler, confirme que «pendant la première année, les entreprises ont eu du mal à comprendre et appliquer cette réforme. Aujourd'hui, elle est entrée dans les moeurs, aussi bien du côté des partenaires (constructeurs, loueurs en longue durée...) que des clients».

OLIVIER JOUANNIC, responsable de flotte automobile, Johnson & Johnson.

OLIVIER JOUANNIC, responsable de flotte automobile, Johnson & Johnson.

Témoignage

«Nous savions qu'une réflexion était en cours, mais pas quels montants allaient être arrêtés»

En raison des montants en jeu, le groupe pharmaceutique Johnson & Johnson a souhaité anticiper la réforme de la taxe sur les véhicules de sociétés (TVS). «Nous savions qu'une réflexion était en cours, mais pas quels montants allaient être arrêtés», concède Olivier Jouannic, responsable de la flotte du groupe, composée de 1 750 véhicules particuliers au niveau national, tous en location longue durée. Se doutant malgré tout de ce qui allait se profiler, il a été décidé de modifier la politique de flotte.
Cela s'est traduit par des motorisations plus modestes, avec comme compensation une revue à la hausse du niveau d'équipement, notamment sur le plan de la sécurité. Olivier Jouannic estime cependant «qu'il faut conserver un équilibre entre le souhait des ressources humaines et celui des finances. Le véhicule joue un rôle important au moment d'une embauche.» A savoir, ne pas tomber dans l'excès inverse et proposer des véhicules trop petits. La rotation des véhicules, habituellement de l'ordre de 24 à 30 mois, a été accélérée. Accessoirement, cela a permis aux collaborateurs de retrouver plus rapidement une voiture neuve. Malgré tout, le groupe s'est acquitté d'une TVS plus importante lors du dernier exercice. Mais Olivier Jouannic pense aujourd'hui «être revenu à peu près au même niveau qu'auparavant. Et d'ici un an, nous devrions être à un niveau inférieur à celui de 2005.»

Johnson & Johnson

- ACTIVITE: Pharmaceutique, produits de santé et grand public.

- CA 2006 MONDE: 39,3 milliards d'euros.

- EFFECTIF MONDE: 122 200 salariés.

De 15 à 20% d'économies

Avec le recul, cette réforme a été l'occasion, pour les entreprises, de mener une profonde réflexion sur leur politique de flotte. Certaines, probablement les plus taxées, sont allées jusqu'à anticiper le renouvellement de leur parc. «Des clients ont restitué en masse leurs véhicules puisqu'ils étaient touchés de plein fouet. L'effet fiscal a poussé au renouvellement massif de certaines flottes, composées de voitures trop polluantes», affirme Emmanuel Foreau. Le seuil limite fixé par les entreprises se situe désormais à 140 grammes de CO2 par kilomètre. Au- delà, la facture est multipliée par deux. Les moteurs affichant une puissance aux alentours de 100 chevaux sont donc privilégiés. «La tendance est à la sous- motorisation des véhicules, ce qui va également de pair avec la politique menée en matière de sécurité routière. En compensation, les collaborateurs ont droit à des finitions plus haut de gamme», estime Arnaud Desèves, responsable commercial location longue durée chez Sixt. Les économies de TVS peuvent ainsi atteindre jusqu'à 20%.

Mais toutes les sociétés ne peuvent mettre à disposition de leurs collaborateurs des véhicules bas de gamme. Question d'image. «Certaines entreprises autorisent des véhicules pouvant dépasser 140 grammes de CO2 par kilomètre, indique Bernard Roland, gérant de BRC, cabinet de conseil en matière de politique et de gestion de parc automobile. Elles plafonnent alors à 160 grammes les émissions des véhicules de leurs collaborateurs. Les grands monospaces, les boîtes automatiques et les véhicules essences sont bannis de la liste de choix proposés.» Reste le cas des véhicules de direction. La tolérance est désormais fixée à 200 grammes de CO2 par kilomètre. A ce niveau, les rédacteurs de la nouvelle TVS n'ont pas fait de cadeau. Un exemple: une Audi A4 3.0 Tdi Quattro, 13 CV, qui émet 233 grammes de CO/km, coû tait 2 440 euros de TVS en 2005. En 2007, le montant est passé à 3 961 euros... ou à «seulement» 3 600 euros si le véhicule était en possession de l'entreprise avant le 1er janvier 2006. Bernard Roland le rappelle à son tour, «les entreprises qui ont tardé à réagir publient toutes des appels d'offres remettant en cause, à juste titre, leur politique de flotte.»

Outre la taxation des véhicules puissants, la nouvelle TVS vise à mettre un terme au régime des indemnités kilométriques. Les collaborateurs, qui avaient pour habitude de se faire rembourser 40 000 km par leur entreprise, risquent de perdre cet avantage pour la raison suivante: l'entreprise, lorsqu'elle rembourse entre 35 000 et 45 000 kilomètres, doit dorénavant payer 75% de la TVS pour le véhicule en question. Pour peu qu'il dépasse les 200 grammes de CO2/km... Et encore, la première mouture de la loi de finances prévoyait des seuils autrement plus bas. L'entreprise devait alors payer 100% de la TVS à partir de 20 000 kilo mètres remboursés. Face à la grogne des entreprises, principalement des PME, le gouvernement a fait marche arrière. Pour Olivier Rigoni (Cogecar), «le premier barème était la conséquence du lobbying des loueurs, car ils souhaitent conquérir le marché des PME. Avec la nouvelle assiette, ils se sont pris les pieds dans le tapis.» Les indemnités kilométriques ont malgré tout du plomb dans l'aile...

Olivier Rigoni, Cogecar

«.Les entreprises ne se sont pas rendu compte des conséquences de la nouvelle TVS.».

Des effets pervers

Quoi qu il en soit, cette course aux grammes de CO2 pourrait faire le jeu de certains constructeurs, notamment français, dont les véhicules figurent en haut du classement des véhicules propres de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). «Les constructeurs qui sont le plus en avance remporteront donc la mise», confirme Emmanuel Foreau de DCS Fleet. Les constructeurs allemands, peu réputés pour la sobriété de leurs automobiles, se lancent à leur tour dans l'aventure écolo. Volkswagen a récemment présenté la version Bluemotion de la Passât. Cette technologie, qui lui est propre, a pour vocation de réduire la consommation et les émissions de CO2 . La Passât Bluemotion est ainsi créditée d'une consommation moyenne de 5,1 litres aux 100 kilomètres, de 136 grammes de CO2 par kilomètre, pour un bloc TDi de 105 chevaux. Il ne faut pas oublier les véhicules hybrides, encore peu nombreux, et donc assez chers. Beaucoup d'entreprises en ont fait l'éloge mais peu ont investi. Pour rappel, les constructeurs ont également été invités par l'Union européenne à sérieusement réduire les émissions polluantes de leurs véhicules.

Mais ce virage écologique ne semble pas avoir que des bons côtés. «L'un des effets pervers de la nouvelle TVS est la difficulté des loueurs à revendre les véhicules sous-motorisés sur le marché des particuliers, observe Emmanuel Foreau. Les gains que les entreprises vont réaliser en début de contrat sur la TVS risquent alors d'être perdus à la fin, car le manque à gagner pour le loueur lors de la revente est impacté sur le loyer.» Le même problème pourrait se présenter pour les véhicules fonctionnant au biocarburant. L'Etat exonère les entreprises de la TVS pendant deux ans, mais les loueurs craignent que ne se reproduise le schéma des véhicules GPL et électriques qui, il y a quelques années, avait vu la disparition rapide de ces technologies. Le problème est que ces énergies alternatives ne se sont pas développées surtout en raison d'un manque d'informations des entreprises. Cette fois-ci, elles ne pourront pas dire qu'elles n'ont pas été prévenues.

 
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Damien Chalon

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