Le bâtiment modulaire, une solution à part entière
Délais de livraison rapides, coûts compétitifs... Le bâtiment modulaire est aujourd'hui utilisé dans les entreprises en recherche de flexibilité et d'économies. Une famille désormais gérée par les achats, qui mettent ainsi un pied dans l'immobilier.
Je m'abonneAprès le BTP et la sphère publique, le recours au bâtiment modulaire s'est aujourd'hui banalisé dans le secieur xeniaire ex i inausirie. Une occasion pour les ache teurs, souvent tenus à l'écart des problématiques immobilières, de s'implanter dans cette famille où ils peuvent apporter de la valeur ajoutée. De gros volumes d'éco nomies sont en effet réalisables. Un mètre carré de construction modulaire peut coûter 20 à 30% moins cher qu'un bâtiment en dur et l'effet volume est sou vent important: les entre prises louent ou achètent des surfaces moyennes de 500 à 600 m2. Il n'est pas rare que cer tains projets atteignent 8 000 à 9 000 m2, avec la limite propre aux bâtiments modulaires, qui n'excédent pas deux étages (R+2). «La plupart de nos interlocuteurs en entreprises sont des acheteurs, qui tra vaillent en binôme avec les services techniques, indique Richard Lorant, directeur général France de Touax, l'un des principaux fabricants euro péens. Ils ont en gênerai une approche axée sur le prix, mais consi dèrent, de plus en plus, le projet dans sa globalité. Il faut par exemple tenir compte de l'étude de faisabilité sur le terrain d'accueil du bâtiment pour définir le délai de livraison et le prix final.»
En France, le marché du bâtiment modu laire représente un chiffre d'affaires d'en viron un milliard d'euros, dont 650 millions ont été réalisés en 2006 par la quinzaine d'adhérents de l'Asso ciation des construc tions indus trialisées et modulai res (Acim). Laquel le annonce une crois sance annuelle de l'ordre de 10%. «Notre activité et notre chiffre d'affaires se développent plus vite que le secteur de la construction, où le modulaire reste minoritaire», précise Bertrand Quénot, directeur général France d'Algeco et président de l'Acim. La location est un mode de gestion privilégié par rap port à l'achat. «Elle demeure notre coeur de métier, reprend Bertrand Quénot. L'usage temporaire se généralise à tous les )secteurs de l'économie, et la durée s'allonge.»
Les fabricants estiment la durée de location moyenne à une dizaine de mois, contre une demi- douzaine aupara vant. «Les entreprises ont besoin de plus de flexibilité et appliquent cette logique à la gestion de leurs locaux, ana lyse Richard Lorant. Cela leur permet de s'adaptera la mobilité géographique de leurs salariés et de faire évoluer leurs sites, qui deviennent modulables et adaptables.» Déménagement ou aménagement d'entreprise, accroissement temporaire d'activité, mouvement important de personnel, bureaux provisoi res en attendant la livraison des locaux en dur, etc. Les usages sont multiples.
Les grosses commandes concernent de plus en plus des usages de bureau. Le modulaire est largement monté en gamme et peut offrir un niveau de confort équivalent à une construction classique. Pour leur siège social, certaines entreprises font éga lement le choix du bâtiment modulaire. Ce fut le cas, par exemple, du club de football de l'Olympique de Marseille qui a réuni l'an dernier, sur 1 800 m2 de construction modulaire fournie par Algeco, ses pôles administratifs, sa salle des trophées, la chaîne de télévision OMTV et un restau rant. Le tout avec terrasses et ascenseur. «Aujourd'hui, les solutions architecturées-le haut de gamme de la construction modulaire - représentent un tiers de notre chiffre d'affaires, indique Christophe Cougnaud, directeur général d'Yves Cougnaud. En matière d'architecture, tout est possible. Nous proposons ainsi différents matériaux pour la finition: verre, acier, terre cuite, bois, marbre...»
Christophe Cougnaud, Yves Cougnaud
«Nous proposons des solutions architecturées haut le gamme qui n'ont rien à envier aux constructions en dur.»
Un confort équivalent aux constructions classiques
A I'image de la construction en dur, le modulaire intègre les problématiques envi ronnementales. La société Yves Cougnaud propose ainsi, depuis trois ans, des toitu res végétalisées. «Nous nous inscrivons ainsi dans la démarche de HQE-haute qualité environnementale pour réduire les consommations d'énergie», indique Christophe Cougnaud. De son côté, Bertrand Quénot (Algeco) rappelle que «même pour un usage temporaire, nous pouvons offrir un niveau de qualité et de confort équivalent aux standards de la construction traditionnelle». Pour toutes ces solutions haut de gamme, le modulaire perd ses atouts prix, qui flirtent alors avec ceux de la construction traditionnelle. Il conserve cependant son avantage compétitif en termes de délais de livraison et de souplesse de gestion, grâce à la location. Sur ce marché en plein essor, l'arrivée des acheteurs se traduit par des négociations plus fréquentes sur les prix, certaines commandes ayant d'ailleurs été effectuées par enchères inversées. Selon les fournis seurs, le délai de livraison reste néanmoins le premier critère d'achat pour ce type de prestation: il est deux à trois fois plus rapide que pour un bâtiment en dur. «En général, la demande est assez urgente. La prise de commande est formulée deux à trois mois avant dans l'industrie, et trois à six semaines dans le BTP», indique Richard Lorant. Pour tenir ces délais, les fournisseurs ont industrialisé leur process. «Nos collaborateurs en usine travaillent en 2x8, explique Christophe Cougnaud. Et beaucoup de matériel est déjà stocké.» L'entreprise produit 220 000 m2 de bâtiments par an répar tis sur quatre sites en Vendée. Un réseau d'agences en région parisienne, dans le Sud-Est et le Sud-Ouest, constitue un relais logistique efficace. Ce maillage territorial est essentiel, comme l'explique Bertrand Quénot. «Chacun de nos clients possède une agence à moins de 100 kilomètres de chez lui», précise-t-il. Les délais de livraison sont ainsi raccourcis. Enfin, les acheteurs peuvent prendre en compte les services associés, et/ou conditions com merciales, pour choisir un fournisseur. Pour convaincre de sa capacité à tenir les délais, un réel enjeu pour les achats, Portakabin propose ainsi une semaine de location gra tuite pour chaque jour de retard. De son côté, Algeco dispose depuis peu de la télé surveillance pour ses modules loués.
PASCALE DAOUST, acheteuse en charge du modulaire, Airbus
Témoignage
«La location de bâtiments modulaires répond à une nécessité ponctuelle»
Chaque année, le groupe Airbus loue en moyenne 1 500 m2 de locaux modulaires en France, essentiellement dans la périphérie toulousaine. «Ces locaux ne sont pas une alternative à la construction en dur, explique Pascale Daoust, acheteuse en charge de cette famille. Ces achats répondent à une nécessité ponctuelle. » Les besoins peuvent être de plusieurs ordres: accroissement temporaire d'activité lié à une commande et nécessitant de nouveaux espaces de travail pour les équipes d'ingénieurs, un besoin d'espaces de stockage supplémentaire, de bureaux pour accueillir les collaborateurs dont les locaux sont en travaux, etc. Compte tenu du caractère récurrent de cette prestation, des contrats-cadres fixant un standard technique ont été élaborés et comprennent notamment le respect de normes ou de critères comme la HQE. Néanmoins, les achats consultent systématiquement les services techniques des moyens généraux afin de cibler au mieux les besoins. «Par exemple, nous demandons un doublage acoustique dans les zones où les avions viennent au moteur»,indique Pascale Daoust. Au final, le recours au modulaire permet une économie de l'ordre de 300 euros par mètre carré par rapport à une construction en dur. La réduction du cycle de livraison reste cependant le premier critère d'achat. «Les bâtiments modulaires sont livrés en cinq mois en moyenne. A surface équivalente, il faudrait patienter un an pour une construction en dur.»Quant à la qualité de la construction modulaire, elle est évaluée par les services techniques d'Airbus. Délais, prix et qualité: c'est sur ces trois critères que les contrats-cadres ont été élaborés avec un prestataire local (Spazeo) et national (Yves Cougnaud). «Nos besoins étante la fois variés et permanents, nous leur garantissons un volume d'activité. En retour, nous bénéficions de tarifs négociés. Nous nous inscrivons dans un réel partenariat gagnant-gagnant. »
Airbus
- SECTEUR D'ACTIVITE: construction aéronautique.
CHIFFRE D'AFFAIRES: 26 milliards d'euros (2006).
EFFECTIF: 57 000 personnes.