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La fonction achats passée au crible

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Renforcement des achats hors production, pratiques RSE peu généralisées, communications interne et/ou externe quasi inexistantes... Autant d'enseignements tirés de l'enquête Demos pour Décision Achats. Cette étude dresse, pour la quatrième année, le portrait de la fonction achats.

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Une fonction support dont le poids s'accentue

Véritable pilier organisationnel, les achats sont perçus comme une fonction support en interne par plus d'un acheteur sur deux. C'est l'un des principaux enseignements mis en avant par l'enquête Demos pour cette quatrième édition. Si le métier conserve ses acquis traditionnels, il étoffe son périmètre fonctionnel en s'imposant notamment sur les dépenses indirectes. La preuve? En 2010, les achats hors production - dont le montant s'inscrit entre 25 et 50 millions d'euros - ont progressé de 12 % par rapport à 2009, selon les répondants. Quant aux achats hors production inférieurs à 25 % des achats globaux, ils ont diminué de 11 % sur un an. Un phénomène qui vient confirmer la tendance de la professionnalisation des achats. « Cette fonction est en pleine croissance et gagne en maturité, bien que l'émergence des services achats ne date que d'une dizaine d'années en France, contrairement aux fonctions commerciales et financières », note Michel Duquette du cabinet de conseils en achats Icizen.

Autre leçon tirée de l'enquête: face à une conjoncture toujours instable, les acheteurs ont opéré un repli européen, sinon français de leur zone géographique d'approvisionnement. Seuls 10,7 % des services interrogés réalisent encore plus de 50 % de leurs achats à l'étranger, alors qu'ils étaient près de 18 % en 2008. Un phénomène qui s'explique par plusieurs raisons, notamment « la hausse des coûts de transports et les difficultés à maîtriser les approvisionnements dans les pays émergents », selon le consultant Jean-Jacques Rechenmann.

Méthodologie

Enquête réalisée en ligne par Demos auprès de 136 acheteurs, responsables et directeurs achats, tous secteurs et toutes tailles d'entreprises confondus, du 8 mars 2011 au 18 avril 2011.

« La fonction achats est en pleine croissance et gagne en maturité, bien que l'émergence des services achats ne date que d'une dizaine d'années en France. »
Michel Duquette, Icizen

L'innovation fournisseur peu sollicitée

Pour 53,1 % des acheteurs, le premier critère de sélection d'un fournisseur reste le prix. Rigoureux, 60 % des répondants continuent de décomposer le coût d'un produit ou d'un service proposé. « Gare au cost killing qui n instaure pas une relation win-win, rappelle Muriel Guillemot, consultante au sein du cabinet AchaConseil. D'autant que ce type de démarche rend l' innovation fournisseur impossible à capter. »

A ce titre, la majorité des acheteurs admettent que les PME innovantes ne constituent que 2 % à peine de leur panel fournis seurs. Pourtant, la collaboration avec de tels acteurs renforce largement la compétitivité des entreprises sur le long terme, selon nombre d'observateurs. « C'est pourquoi le lancement d'un appel d'offres ne doit pas uniquement s'inscrire dans une logique de réduction de coûts mais bien favoriser la mise en place de partenariats innovants », rappelle Michel Duquette (Icizen). Comment procéder dans la pratique? « Il faut établir une cartographie de ses fournisseurs afin de déterminer ceux qui ont le plus fort potentiel et établir un système de fidélisation pour mieux capter l' innovation de ces derniers», précise Muriel Guillemot (AchaConseil). Une action également possible grâce à la mise en place d'outils de gestion de la relation fournisseur. Toutefois, l'étude révèle qu'ils sont loin d'être généralisés dans les services achats. Seul un tiers des répondants recourent à un logiciel de pilotage achats. La raison? « Le déploiement d'une solution d'optimisation de la relation fournisseur - un SRM, supplier relationship management - au coût de plusieurs centaines de milliers d'euros, suppose un investissement de taille, souvent inabordable pour nombre d'entreprises, notamment les PME », explique Jean-Jacques Rechenmann, (consultant). D'autant plus que la mise en place d'une telle solution suppose le déploiement, en amont, d'une vision achats sur le long terme. « Cette dernière fait encore défaut dans nombre d'entreprises. En particulier, celles de taille moyenne. A contrario, les grands groupes automobiles sont dotés d'un service achats depuis plusieurs années », explique Patrick Caverivière du cabinet éponyme, conseil en entreprise.

Laurent Marie, Traidis

Laurent Marie, Traidis

Témoignage
« Exploiter la newsletter interne pour diffuser nos progrès »

« Malgré notre expertise en matière d'analyse de la valeur, il nous est encore relativement difficile d'accéder aux phases amont d'un processus achats. Notre intervention est surtout sollicitée au cours de la signature du contrat et dans le cadre du sourcing », explique Laurent Marie, responsable achats depuis trois ans chez Traidis, spécialiste du traitement et de la gestion des espèces. Pour être davantage reconnue en interne, la fonction achats souhaite donc miser sur une meilleure communication en interne. Une manière de mieux promouvoir la valeur ajoutée apportée par le service, aussi bien en termes de coûts, de délais et de qualité.
« Nous nous efforçons de nous rapprocher au maximum des clients internes afin de comprendre et anticiper ensemble les critères de choix d'un produit ou d'un service », explique le responsable achats. Pour ce faire, les acheteurs communiquent régulièrement par mail avec la direction opérationnelle prescriptrice, basée en région parisienne. Toutefois, les moyens de communication sont encore limités au sein de la PME: pas d'intranet dans l'entreprise mais une newsletter interne qui permet de souligner les actions phares mises au point par les différents services. «Via cette newsletter, nous avons, par exemple, pu informer les différents services de nos dernières réalisations en matière de réduction de coûts», poursuit le responsable achats. Une initiative encourageante qui pourrait aider les achats à renforcer leur rôle d'interface entre prescripteurs et fournisseurs.

Traidis

ACTIVITE
Traitement et gestion d'espèces
CHIFFRE D'AFFAIRES 2010
3,9 millions d'euros
EFFECTIF
25 collaborateurs
VOLUME D'ACHATS 2010
1 million d'euros
EFFECTIF ACHATS
2 collaborateurs

Vers plus de transparence en termes de communication?

Muriel Guillemot (AchaConseil) plante le décor: « Dans de nombreuses d'entreprises, les prescripteurs ne comprennent toujours pas la fonction achats. Il y a un vrai chantier d'action et de transparence à mener en matière de communication ». Et les chiffres parlent d'eux-mêmes: 59,3 % des interrogés n'ont pas organisé une convention achats avec les principaux prescripteurs de leur entreprise. Un constat regrettable d'autant qu'il existe un panel de moyens sur lesquels peuvent miser les acheteurs pour améliorer leur communication en interne. « Pourquoi ne pas convoquer le comité de direction lors d'une réunion périodique pour faire part des plans de progrès en cours de réalisation? », propose Muriel Guillemot, en citant également d'autres leviers de communication comme la mise en place de flashs info réguliers ou la diffusion de feuilles de route dans les services. Seuls 1 1,2 % des répondants réalisent une lettre d'information régulière sur les achats, et 27 % uniquement ont déjà conçu une plaquette de leur service achats. Pour optimiser la communication, Michel Duquette (Icizen) suggère la mise en place d'une équipe projet constituée de prescripteurs et d'acheteurs. « Parfois, ceux-ci sont clairement voulus par le top management de l'entreprise comme chez Alstom ou chez Areva », explique-t-il. Une méthode qui peut, certes, paraître radicale, mais « c'est un premier pas pour faire reconnaître aux clients internes la valeur ajoutée nécessaire apportée par les acheteurs », estime le consultant. Quant à la communication externe, des progrès restent également à faire. Moins d'un tiers des acheteurs interrogés déclarent avoir déjà organisé une convention fournisseurs.

Les achats responsables: encore quelques efforts

Quid de la place des achats responsables? Selon l'enquête Demos, seuls 28,8 % des sondés affirment que leur entreprise a adhéré à une charte nationale ou mondiale en rapport avec les achats responsables ou durables. Et dans seulement 5 % de cas, le développement durable compte pour au moins 15 % dans la sélection d'un fournisseur. Côté audits environnementaux et sociaux des fournisseurs, seuls 31,5 % des répondants déclarent en effectuer. « Monter un bureau de liaison pour mesurer la performance responsabilité sociale et environnementale (RSE) de fournisseurs étrangers représente un investissement très important que beaucoup d'entreprises, notamment de taille intermédiaire, ne peuvent se permettre », explique Jean-Jacques Rechenmann. En revanche, les services achats se montrent proactifs en matière de collaboration avec le secteur protégé. Un répondant sur deux fait appel à des Esat (Etablissement de services d'aide par le travail) et EA (entreprise adaptée). « D'une façon générale, les directions achats ont encore besoin de temps pour mettre en place une politique globale d'achats en cohérence avec les normes dédiées en la matière », souligne Muriel Guillemot (AchaConseil). D'autant qu'il n'est pas facile pour un acheteur de s'y retrouver dans la jungle des certifications existantes (ISO 9000, ISO 14001). Sans oublier celles qui viennent d'être édictées (ISO 26000). « Il existe des organismes censés accompagner les acheteurs dans la mise en place de pratiques RSE comme l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), précise la consultante. De plus, la mise en place d'une politique d'achats durables repose avant tout sur une évolution des mentalités. »

Sylvain Petit, Duferco Coating

Sylvain Petit, Duferco Coating

Témoignage
«Nous suivons une démarche de certification»

Le service achats de Duferco Coating, spécialiste de la vente de produits en métallurgie, fait preuve de maturité dans sa gestion de la relation fournisseur. « Le caractère spécifique de notre domaine d'activité nous a conduit à nous engager progressivement dans une démarche de Duferco Coating certification », explique Sylvain Petit, ex-responsable achats chez Duferco Coating. L'entreprise est certifiée ISO TS 16949, un référentiel d'origine américaine appliqué à l'évaluation des fournisseurs de rang 1 dans le secteur automobile. Certifiée ISO 14001, l'entreprise analyse la performance de ses fournisseurs au niveau environnemental. Pour rendre ses déchets plus écologiques, le service achats a conclu un partenairiat avec une entreprise de recyclage de résidus de zinc auprès d un fournisseur Lensois Recytech. « Avant de nous engager, nous avons vérifié le processus référentiel de récupération de ces déchets avec le responsable environnement de Duferco Coating. Nous nous sommes donc assurés de la iabilité de leur filière », précise l'acheteur. Ce dernier rappelle que la mise en place de telles initiatives suppose un travail de fond, nécessitant un dialogue au quotidien 4 collaborateurs avec les fournisseurs et les clients internes.

Du ferco Coating

ACTIVITE
Métallurgie
CHIFFRE D AFFAIRES 2010
280 millions d'euros
EFFECTIF
515 collaborateurs
VOLUME DACHATS 2010
50 millions d'euros
EFFECTIF ACHATS
4 collaborateurs

Soizic Guinard, InterContinental Paris le Grand

Soizic Guinard, InterContinental Paris le Grand

Témoignage
« Nous faisons travailler un centre de réinsertion et de recyclage

Si l'acheteuse Soizic Guinard définit sa profession comme une fonction support au service des directions opérationnelles, elle ne la considère pas moins comme un des piliers de l'InterContinental Paris le Grand. Arrivée en 1997 au sein du groupe hôtelier IHG, elle occupe depuis six ans la fonction de responsable achats et gère avec son adjointe un volume d'achats de 22 millions d'euros et 700 fournisseurs. « Le service achats est rattaché à la direction financière de l'hôtel ainsi que la direction générale. Nous travaillons notamment sur la négociation, après avoir défini et ciblé les besoins des directions opérationnelles », explique la responsable achats. Le service sous la houlette de Soizic Guinard met à disposition des prescripteurs un prologiciel de passation de commande qui intègre l'ensemble des produits et services référencés. « Lorsqu'un prescripteur souhaite faire appel à un fournisseur ou un produit non référencé, il doit d'abord nous en faire la demande », explique la responsable achats. Signe de maturité du service? Probablement. Mais la responsable achats veut aller plus loin encore en intégrant des bonnes pratiques de responsabilités sociales et environnementales au coeur de certaines familles d'achats. «Nous avons recemment changé de fournisseurs de jardinières pour notre restaurant, le Café de la Paix, au profit d'un prestataire de services, AP2R, qui fait appel à un centre de réinsertion et de vente recyclage pour la conception et la réalisation de ses produits de vente», explique-t-elle. La commande a été lancée en mars pour une livraison en juin.

IHG

ACTIVITE
Hôtellerie
CHIFFRE D AFFAIRES 2010
80 millions d'euros
EFFECTIF
550 collaborateurs
EFFECTIF DACHATS
2 collaborateurs

Une position stratégique à défendre

Tournée vers l'avenir, la fonction achats attire les jeunes. L'enquête fait état d'une forte progression des acheteurs âgés de 30 à 35 ans. En 20 10, ils sont 22,5 % à avoir répondu. Une part en progression de 9 % par rapport à l'an dernier, pour la même tranche d'âge. Une tendance de fond puisque cette génération avait déjà grimpé de 7 % en 2009 par rapport à 2008. Issu dans près de 30 % des cas d'une formation initiale aboutissant à un niveau d'études bac + 4 en école de commerce ou d'ingénieur, l'acheteur est reconnu pour ses capacités de management et d'expertise. « Pour ces profils, il est plus facile d'aborder le spectre des achats. Un avantage pour ces derniers puisque les responsables de recrutement ont tendance à mettre la barre de plus en plus haut », explique Patrick Caverivière. Quant aux acheteurs seniors, qui représentent plus d'un quart du panel interrogé, ils ont pour la plupart fait leur entrée dans les achats via la mobilité interne.

Selon l'étude, la majorité du panel dispose de moins de cinq ans d'expérience dans les achats. « En général, ils ont une expérience dans la production ou la logistique », ajoute Patrick Caverivière. Mais qu'en est-il des opportunités de carrière pour un acheteur? Souvent rattachée à la direction financière (29,9 %) ou à la direction générale (42,5 %) la fonction achats est considérée comme une fonction passerelle. « Pourtant, de plus en plus d'acheteurs expriment le souhait de grimper dans leur propre service », estime Michel Duquette (Icizen). Tendance relevée par l'étude: 40 % des personnes interrogées ont décidé de devenir acheteur pour les opportunités générées par une telle carrière. 60 % d'entre elles souhaitent progresser hiérarchiquement au sein des achats. Encore faut-il que ce service soit assez mature pour proposer des perspectives d'évolution! « Dans les grandes structures, la direction achats a un certain poids. Sa vision stratégique est reconnue », explique Patrick Caverivière. Une source d'inspiration pour les PME...

Céline Nirrengarten, Quntel

Céline Nirrengarten, Quntel

Expérience
La fonction achats dans les veines

Céline Nirrengarten est acheteur chez Quantel, PME spécialisée dans la fabrication de lasers industriels et médicaux. En poste depuis dix ans, ses prérogatives sont concentrées sur deux familles d'achats: l'optique et l'électronique. Avec son responsable achats, elle gère un volume d'achats - de production principalement - évalué à 20 millions d'euros. Auparavant, elle occupait un poste d'acheteuse-revendeuse au sein d'une centrale d'achats. Diplômée d'un BTS en commerce international, la jeune femme a toujours baigné dans l'univers des achats, sa mère ayant exercé cette profession avant elle. Mais à la question de savoir si une promotion interne lui a déjà été proposée, Céline Nirrengarten répond: « L'éventualité de devenir responsable achats ne me tente pas pour le moment. Cette fonction exige une présence et un niveau de responsabilité tel qu'elle n'est pour le moment pas compatible avec mes contraintes d'ordre personnel ». Pour autant, Céline Nirrengarten ne manque pas d'attributions. Elle est en relation avec vingt fournisseurs stratégiques, « nous travaillons avec eux de façon quotidienne, sans toutefois éprouver le besoin de mettre en place un outil de gestion de la relation fournisseur En revanche, nous avons développé un ERP à travers un intranet avec nos filiales. Ce dernier ne sera déployé qu'en fin d'année 201 1 », explique-t-elle. L'acheteuse avoue néanmoins être intéressée par une position de responsable de ligne de production tout en gardant la responsabilité d'une des familles achats qu'elle gère.

Quantel

ACTIVITE
Technologies laser
CA CONSOLIDE EN 2010
56,1 millions d'euros
EFFECTIF
300-350 salariés
VOLUME DACHATS 2010
20 millions d'euros
EFFECTIF ACHATS
2 collaborateurs

 
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Sihem Fekih

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