La fin des dérives grâce aux cartes carburant
Toutes les entreprises ne proposent pas de cartes carburant à leurs employés. Et pourtant, celles-ci font l'unanimité. Simplification de gestion, fin des notes de frais, meilleure récupération de la TVA, remises des pétroliers, contrôles des abus... La liste de leurs avantages est longue, pour un coût quasi nul. Ces cartes s'avèrent indispensables à l'heure où le prix du carburant atteint des sommets.
Je m'abonneLe but des cartes carburant n'est pas de contrôler les salariés, mais d'aider les entreprises à gérer leur poste carburant et à optimiser leurs coûts, notamment en limitant les fraudes», assure Karine Serre, Database Analyst & Operational Marketing Fleet chez Shell. Avec la hausse du prix à la pompe, les gestionnaires de flotte automobile, épaulés par les achats ou les services généraux, réalisent progressivement ce qu'ils ont à gagner en surveillant de plus près ce poste de dépenses. Par exemple, négocier quelques centimes d'euros par litre de carburant avec les pétroliers dans le cadre des appels d'offres de cartes carburant n'est pas une petite économie. «Après le loyer, le poste carburant est le plus élevé pour un véhicule d'entreprise, ajoute Gilles Bellemère, directeur général délégué d'ALD Automotive, société spécialisée dans la location et la gestion automobile. Il est donc logique d'apporter l'attention nécessaire à cette dépense.»
Les cartes carburant, proposées par Total, Shell, BP, et depuis peu par Auchan, sont sans conteste un outil très pratique à la disposition des entreprises. Il s'agit de cartes de paiement sécurisées, parfois gratuites (voir notre tableau ci-dessus), qui sont avant tout un moyen de mettre fin au système des notes de frais. «Avec ce système, la récupération de la TVA n'est pas systématique, explique Michel Berthier, directeur front-office opérationnel chez le loueur Arval. Grâce aux cartes et à leur facturation unique, la comptabilité peut la récupérer beaucoup plus facilement et plus rapidement» Mais pas seulement.
DAVID PEDREDRO, responsable achats, Axa France
Témoignage
«Identifier le pétrolier qui offrait le meilleur rapport prix/réseau»
Négocier le prix du carburant avec les pétroliers et remettre à jour les prestations annexes liées à la carte carburant étaient les objectifs d'Axa France lors de l'appel d'offres de renouvellement du dossier carte carburant lancé en 2006. «Des simulations ont été effectuées afin d'identifier le pétrolier qui offrait le meilleur rapport prix/réseau», explique David Pedrero, responsable achats chez Axa France. Le délai de livraison des cartes, la procédure d'opposition, les services proposés ou encore la qualité des outils de reporting ont aussi joué. Axa France dispose de 2000 cartes, une pour chaque véhicule loué. Les services souscrits auprès du pétrolier sont lepéage, les tunnels, les ponts, le lavage et, dans certains cas, l'entretien des véhicules. La boutique n'en fait pas partie. «L'utilisation des cartes fait l'objet de restrictions, prévient David Pedrero. Les collaborateurs peuvent l'utiliser le week-end pour des raisons pratiques, comme le plein le dimanche soir pour les commerciaux. En revanche, elles sont exclusivement destinées à l'achat de diesel.» Les outils de reporting du pétrolier sont bien évidemment utilisés. «Ils permettent de faire remonter toutes les informations dont nous avons besoin et des alertes se déclenchent en cas d'anomalie», apprécie David Pedrero. Les outils de reporting des loueurs sont aussi parcourus. «Grâce aux cartes carburant, nous bénéficions d'une meilleure vision de ce poste de dépenses», conclut David Pedrero.
AXA France
- ACTIVITE: Société d'assurances
- EFFECTIF: 16 000 employés.
- CHIFFRE D'AFFAIRES 2005: 19,8 milliards d'euros.
Une multitude de services associés
Les pétroliers proposent une multitude de services autres que l'achat de carburant. Les collaborateurs peuvent payer les péages, l'entretien des véhicules, les achats en boutique, le lavage et, dans certains cas, le parking (Total avec Vinci Park). «L'ouverture à l'ensemble de ces services reste assez rare, constate toutefois Olivier Rigoni, fondateur du cabinet conseil Cogecar. Seul le paiement des péages est toléré par les entreprises. Pour le reste, elles préfèrent encore les notes de frais.» Xavier Bénard, responsable du développement des services chez Aon Auto, note de son côté «un déclin des demandes concernant les péages. Les entreprises souhaitent de plus en plus traiter directement avec les sociétés d'autoroute afin d'obtenir des prestations moins chères.» Quoi qu'il en soit, les gestionnaires de flotte ont la possibilité de paramétrer les cartes carburant en fonction des catégories d'achat. Ils peuvent également fixer un montant de dépenses en carburant maximum, autoriser l'utilisation ou non de la carte le week-end, des péages pendant les vacances... Leur préoccupation principale est surtout de contrôler la consommation de carburant des collaborateurs et de limiter les abus. Les autres services proposés par les cartes relèvent de la catégorie des avantages. «Certains collaborateurs perçoivent ces cartes comme un outil de flicage dès leur passage à la pompe, s'étonne Olivier Rigoni (Cogecar). Alors que, tout compte fait, la carte est surtout intéressante puisqu'ils n'ont plus à effectuer d'avances de frais».
MARC JORDONO, responsable du service achats et services généraux, Mediapost
Témoignage
«On peut vérifier si la consommation d'un véhicule est excessive»
«Les boutiques des stations-service sont la porte ouverte à des abus que l'on préfère éviter», confie Marc Jordono, responsable du service achats et services généraux de Mediapost, filiale du groupe La Poste. Oubliés les friandises, sandwichs et autres produits proposés dans les boutiques des stations-essence. L'utilisation des cartes carburant, en l'occurrence celles de Total, a été limitée au paiement des péages, des lavages, et bien évidemment du carburant. Pourquoi le choix de Total? Le pétrolier français disposait d'une longueur d'avance sur la concurrence, comme l'explique Marc Jordono: «Outre son statut de leader du marché, Total avait conclu un accord-cadre avec La Poste, ce dont nous avons profité.» Toutefois, Mediapost n'est pas en relation directe avec le pétrolier. La gestion des cartes, le suivi et la consolidation des données ont été confiés aux deux loueurs longue durée qui gèrent les 600 véhicules de la société. Marc Jordono exige de ces deux prestataires des reportings mensuels sur l'utilisation des cartes carburant, afin de détecter les anomalies le plus rapidement possible (deux pleins successifs, circulation le week-end...), suivant des critères établis par le service achats de Mediapost. «Nous pouvons ainsi vérifier si la consommation d'un véhicule est excessive, voir si c'est une tendance récurrente et identifier s'il s'agit d'un mauvais réglage ou d'une conduite inadaptée», indique Marc Jordono. Ce dernier reste pragmatique en tolérant certains écarts justifiés (plus de déplacements sur une courte période...).
Mediapost
- ACTIVITE: Filiale du groupe La Poste, spécialiste de la communication de proximité.
- EFFECTIF: 13 500 employés.
- CHIFFRE D'AFFAIRES 2005: 370 millions d'euros.
De l'importance des reportings
Pour les aider dans la gestion de ces cartes, les entreprises font de plus en plus appel à leurs loueurs en longue durée. «Gérer la flotte à la place des entreprises est à la base de notre métier, rappelle Gilles Bellemère. Nous proposons des reportings, des conditions négociées avec les différents fournisseurs... Cela vaut bien évidemment pour les cartes carburant.» Les loueurs servent d'interface entre les clients et les pétroliers et sont ainsi l'interlocuteur unique des gestionnaires de parc. «Plus de 30 % des entreprises ont décidé de confier la gestion des cartes carburant à leur loueur en longue durée. Ce dernier facture cette prestation entre un et trois euros HT par mois et par véhicule. Cela englobe la commande des cartes, leur renouvellement (généralement tous les deux ans, NDLR), les oppositions...», détaille Bernard Roland, consultant spécialiste. Il faut toutefois savoir que certains loueurs vont jusqu'à demander un mois de provision à leurs clients, équivalant à la dépense mensuelle en carburant de l'entreprise. Ce montant peut s'avérer non négligeable. «Le loueur qui n'exige pas ce règlement anticipé aura indéniablement un avantage concurrentiel lors d'un appel d'offres», prévient Olivier Rigoni.
Les loueurs intègrent donc les données des cartes carburant dans les reportings envoyés à leurs clients. «La gestion du carburant est inutile si elle n'est pas suivie d'une analyse, assure Laurent Hermesse, chef du département LLD chez Alphabet, filiale du groupe BMW. Nous croisons les données que nous recevons, ce qui permet au gestionnaire, s'il le souhaite, de vérifier la consommation ou encore d'optimiser les déplacements. Il ne s'agit pas ici d'un flicage, mais d'un outil permettant de prendre les bonnes décisions.» Les gestionnaires de parc disposent donc d'un moyen de contrôle précis de l'utilisation qui est faite de ces cartes. «Il est ainsi possible de détecter les anomalies comme des pleins supérieurs à la capacité du réservoir ou réalisés à quelques minutes d'intervalle.», estime Michel Berthier.
Si elles passent directement par les pétroliers, les entreprises ont également accès à de nombreux reportings. Par exemple, Shell propose trois services: EuroShell Online, EuroShell Alerts et EuroShell Reports. Le premier, EuroShell Online, est un site internet sécurisé qui permet de consulter en temps réel le détail des transactions, de gérer les cartes en ligne et de télécharger les données. Les utilisateurs ont la possibilité de créer des rapports de synthèse et des graphiques en fonction des besoins. Le second, EuroShell Alerts, est un outil qui permet d'être averti par mail de toute transaction anormale de la carte sous 48 heures. Chaque alerte est envoyée avec le détail des informations associées aux transactions. Enfin, EuroShell Reports est un outil de gestion des dépenses qui fournit des rapports de synthèse (par carte, par véhicule, par compte...). Mais, pour l'heure, Total reste le leader incontesté du marché en raison d'un maillage du territoire sans équivalent. Ses deux principaux concurrents sont Shell et BP. En attendant la montée en puissance de la grande distribution, avec Auchan et prochainement Carrefour?