L'externalisation du courrier gagne du terrain
A l'image des autres secteurs du facilities management, le service courrier est de plus en plus externalisé. Les prestataires élargissent, en effet, leur gamme de services à tout le pôle document, afin de garantir des gains de productivité. La dématérialisation du courrier entrant a récemment ouvert de nouvelles perspectives d'économies.
Je m'abonneLes services courrier s'ouvrent timidement à l'externalisation. «Pour la majorité des entreprises, l'externalisation de ce service intervient longtemps après celles d'autres départements», constate Xavier Domec, directeur du pôle courrier au sein d'ISS Accueil & Services, filiale du leader du multiservices. De fait, selon le prestataire, le marché affiche une croissance annuelle de 10 à 20 % et pèse entre 70 et 90 millions d'euros. Un volume encore faible par rapport aux fonctions comme l'accueil ou la propreté, qui représentent respectivement plusieurs centaines de millions et plusieurs milliards d'euros. Signe des temps: le marché suscite la convoitise des acteurs étrangers. «Les postes étrangères, notamment le Suisse MailSource, arrivent sur un marché qu'ont investi récemment des acteurs du monde de l'accueil et de la sécurité, ainsi que des éditeurs de logiciels de dématérialisation du courrier entrant», analyse Philippe Rideau, consultant chez Sérénia, un cabinet de conseil en optimisation des coûts et en externalisation. Au traitement traditionnel du courrier entrant et sortant, s'ajoute désormais la manipulation des lettres internes. «Cela concerne notamment les entreprises qui, à côté de leur siège, comptent de nombreux établissements régionaux, à l'image de la bancassurance. En plus de la gestion des échanges courriers traditionnels de chèques, dossiers clients etc., une demande de traçabilité des documents apparaît», indique Jean-Yves Terrien, chargé d'affaires grands comptes chez Dynapost, leader français de la gestion du courrier.
Les particularismes des services courrier ont longtemps compliqué toute optimisation. Ces freins existent toujours. «Dans beaucoup d'entreprises, ce service est soumis à de fréquentes tensions sociales, confie un proche de ce type de dossier. En général, le taux de syndicalisation est fort et la moyenne d'âge est élevée. Dans ce contexte, beaucoup de sociétés évitent de se pencher sur des pistes d'optimisation possibles et à plus forte raison sur l'externalisation.» Les entreprises qui franchissent le pas souhaitent prioritairement se délester de la gestion des ressources humaines. Le risque social est, en effet, transféré au prestataire.
Xavier Domec, ISS
«La moitié de nos clients demandent une solution de géolocalisation pour le courrier sensible.»
Des économies de l'ordre de 10 %
L'autre argument plaidant pour l'externalisation est d'ordre financier. «Dernièrement, nous avons travaillé sur trois leviers dans une grande entreprise, indique Philippe Rideau (Sérénia). Primo, la diminution du nombre de courses urgentes; secundo, la mise en concurrence des expressistes internationaux; tertio, la sensibilisation des utilisateurs internes.» Au final, les économies constatées seraient de l'ordre de 10 % sur les envois internationaux et de 7 à 8 % sur les courses. Les gisements principaux se situent dans les envois express internationaux. «Les entreprises ont du mal à choisir le prestataire le mieux adapté à leurs besoins, explique le consultant. Les tarifs sont difficiles à comparer car les offres prennent à la fois en compte le poids du courrier et la destination. Seul un logiciel spécifique permet un travail exhaustif et rapide. Plutôt que de se livrer elles-mêmes à de telles analyses comparatives, les sociétés préfèrent confier cette tâche à un prestataire.»
L'externalisation du service courrier est donc un premier pas. Nombre de prestataires étendent leur gamme de services. Les offres les plus étendues permettent ainsi d'outsourcer la gestion documentaire dans son ensemble. ISS, groupe international de services, propose trois grands métiers complémentaires au service courrier: la numérisation des documents, la reprographie et un service d'archivage sur site. «C'est le couplage des services qui permet des gains de productivité. L'encadrement managérial et le personnel sont souvent communs, explique Xavier Domec, d'ISS. De plus, les processus d'optimisation sont bien rodés.» Un plan de qualité est, en effet, établi en début de mission et mis à jour régulièrement. Il définit tous les process et les tâches de chaque agent. «Nous sensibilisons également les clients internes de l'entreprise aux coûts, ajoute le directeur du pôle courrier. Par exemple, un logiciel accessible par intranet leur indique le prestataire le moins cher pour une livraison ou une course expresse en fonction de son délai.»
Jean-Yves Terrien confirme cette tendance. «Diverses tâches des services généraux sont regroupées pour être pilotées et optimisées par le prestataire. Au cours d'un même déplacement dans l'entreprise, l'agent peut ainsi être amené à vérifier le bac à papier d'une imprimante, numériser un document en entrée, faire de la mise sous pli, etc.» Les outils de reporting introduits par le prestataire englobent diverses tâches et permettent d'établir des plans de progrès.
BRUNO ROSSI, responsable logistique, Médéric.
Témoignage
«Nous avons réalisé 30% d'économies»
Du fait de son activité de protection sociale complémentaire, le groupe Médéric doit traiter chaque jour de gros volumes de courrier dans ses trois centres de gestion, à Paris, Angers et Orléans. «Nos besoins portent essentiellement sur la gestion du courrier entrant, explique Bruno Rossi, responsable logistique services de proximité et entretien des bâtiments. La majorité des lettres qui nous parviennent ont, en effet, un caractère d'urgence. Elles concernent la liquidation de la retraite, des dépenses de santé, etc.» Conformément à ses engagements de services, Médéric doit traiter chacune de ses lettres avant 14 heures le jour même de réception. Une grande souplesse horaire des agents courrier est nécessaire. D'où le choix de l'externalisation avec Dynapost. Seule une partie du management a été conservée en interne. Le prestataire a fourni une réponse sur mesure avec un effectif d'une quinzaine de personnes, contre vingt-cinq auparavant. «Leur flexibilité permet une meilleure gestion. La majorité du personnel est concentrée sur le créneau du matin, à partir de 7 heures, pour le tri en amont. Le courrier entrant est réparti par grandes typologies: retraite, santé, prévoyance ou maladie.» Chaque famille fait l'objet d'un traitement particulier. Un courrier maladie peut, par exemple, être classé en indemnité journalière ou en longue durée. Il faut également localiser le dossier concerné dans l'une des quarante antennes régionales du groupe. Le prestataire assure la mise à disposition d'un personnel formé aux tâches particulières de Médéric. Dynapost a ainsi mis en place un dispositif de formation continue. Il permet de pallier toute défection de personnel, par exemple à l'occasion d'un congé maladie. «La continuité du service est ainsi garantie», se réjouit Bruno Rossi. Enfin, l'externalisation a permis une maîtrise des budgets. Un contrat avec obligation de résultat est signé chaque année avec le prestataire, qui se rémunère au forfait mensuel. Bruno Rossi évalue à 30% les économies réalisées, grâce notamment à l'optimisation du personnel.
Le groupe Médéric
- SECTEUR: Protection sociale complémentaire.
- CHIFFRE D'AFFAIRES 2005: 2,175 milliards d'euros.
- EFFECTIF: 2 800 personnes.
Une demande de sécurisation accrue
La gestion du courrier s'accompagne d'une demande de sécurisation accrue. «La moitié de nos clients demandent une solution de géolocalisation pour certains courriers sensibles qui peuvent être internes, inter sites ou intrasites», explique Xavier Domec (ISS). Le suivi est permanent, depuis le bureau émetteur jusqu'au destinataire grâce à un système de code-barres et de PDA avec interface intranet déployable tout au long de la chaîne de prestation, expressistes compris. La demande pour ce type de prestation devrait croître. Malgré les mails, le volume de papier reste, en effet, important en interne. «Il y aura toujours des notes de frais, des bulletins de salaire ou des notes internes à faire circuler», analyse Jean-Yves Terrien (Dynapost).
Enfin, le prochain grand chantier du service courrier s'annonce déjà dans de nombreuses entreprises. Il concerne la dématérialisation du courrier entrant, et notamment les factures fournisseurs. Les services achats y décèlent de grandes perspectives d'optimisation. La numérisation permettra ainsi de supprimer les coûts de saisie comptable, de sécuriser le traitement de la facture qui ne subira plus d'erreurs humaines et, enfin, de faciliter l'archivage. La plupart des prestataires se positionnent d'ores et déjà sur ce créneau.