Améliorer le parc tertiaire pour alléger la facture énergétique
La rénovation énergétique des bâtiments tertiaires existants est un gros chantier qui peut s'avérer long et coûteux. De l'audit aux travaux, quelles sont les démarches à suivre? Quels sont les plus importants postes de dépense? Et quelles sont les aides financières à demander? Eléments de réponse.
Je m'abonneUn bâtiment de 6 000 m² construit dans les années soixante-dix, dont l'activité est répartie entre des bureaux et des ateliers industriels, perd 60 % de son énergie par le plafond. Puis, par les murs extérieurs (27 %), les fenêtres (4,5 %), les portes, etc. Un cas qui reflète bien la réalité. « C'est ce type de bâtiment qui est extrêmement énergivore », commente Nicolas Régnier, directeur technique de Green Soluce, bureau d'études spécialisé dans la rénovation énergétique des bâtiments tertiaires, en charge du projet de rénovation de cet immeuble (situé en Ile-de-France). A l'exemple de cette entreprise, qui a effectué un bilan énergétique de son bâtiment avant la réalisation des travaux, de plus en plus de sociétés s'engagent dans la rénovation énergétique de leurs biens immobiliers. Un engouement dû à l'augmentation du coût de l'énergie et à l'obligation du Grenelle 2, de réduire de 38 % la consommation d'énergie du parc de bâtiments à l'horizon 2020. De plus, l'immobilier est le premier poste de dépenses de l'entreprise. S'il représente 25 % des dépenses de l'investisseur à l'acquisition/conception, 75 % du budget concerne son exploitation.
Etape-clé: l'isolation du bâtiment
Pour procéder à la rénovation du bâtiment, des bureaux d'études proposent d'établir un audit de la déperdition thermique des locaux avant d'établir leurs préconisations pour le maître d'oeuvre. Cependant, le Diagnostic de performance énergétique (DPE) n'a qu'une valeur informative. « Nous examinons l'enveloppe du bâtiment à l'aide d'une caméra thermique avant d'explorer les équipements techniques dits «actifs» ( climatisation, éclairage, postes informatiques, etc.). Ensuite, nous pouvons étudier les besoins et les comportements des utilisateurs », explique Nicolas Régnier (Green Soluce). Une fois l'analyse du bâtiment réalisée, les différents postes sont modélisés et un plan d'action est établi. Mais par où faut-il commencer? La liste est longue et les idées reçues nombreuses. Pour le directeur technique de Green Soluce: « Changer les fenêtres n'est pas une priorité. Elles n'entraînent que 10 à 15 % de déperdition de chaleur. Par contre, un toit mal isolé peut engendrer une perte de 40 à 50 % de l'énergie. C'est généralement un des premiers investissements à réaliser ». Installer des équipements très performants en énergie ne sert donc à rien si la structure du bâtiment n'est pas étanche.
Nicolas Régnier, Green Soluce
« Un toit mal isolé peut engendrer une perte de 40 à 50 % de l'énergie. »
Les investissements de base à réaliser
Ces travaux d'isolation du bâtiment sont coûteux. Une isolation extérieure devra respecter l'esthétique du bâtiment, tandis qu'une isolation intérieure réduira la superficie des bureaux. Il s'agit ensuite de s'attaquer aux équipements en fi n de vie, type chaudière et ventilation, pour les remplacer par des chaudières à condensation ou des pompes à chaleur. Nicolas Régnier conseille « des appareils autonomes et intelligents plutôt qu'un système de gestion centralisée, souvent très cher ». Des détecteurs de présence seront parfaitement adaptés pour l'éclairage des bureaux et/ou sanitaires. En parallèle, des actions simples comme un bon réglage du chauffage permet de réduire la facture efficacement.
Frédéric Uztmann, CertiNergy
« Des solutions et aides financières existent comme les Certificats d'économies d'énergie (CEE) souvent méconnus et jugés complexes. »
Des aides pour financer ses travaux de rénovation
Rénover un immeuble tertiaire existant peut s'avérer être un gouffre financier. Des solutions existent cependant comme les Certificats d'économies d'énergie (CEE) souvent «méconnus et jugés complexes» d'après Frédéric Uztmann, président de CertiNergy, entreprise de conseil spécialisée dans les CEE. Des entreprises peuvent monter un projet de partenariat avec des «obligés»
Un enjeu économique pour les sociétés foncières
En ce qui concerne la certification, viser le label Haute qualité environnementale (HQE) est un vrai défi. Le président de Green Soluce est formel: «Il faut miser sur la cible n°4 HQE qui encadre la gestion de l'énergie pour la rénovation du tertiaire». Pour la rénovation énergétique des bâtiments, le label Bâtiment basse consommation (BBC) Rénovation existe. L'enjeu de cette rénovation est primordial car on estime à 1 % la construction de bâtiments neufs dans le tertiaire chaque année. « Un pari important pour les sociétés foncières car la valeur de ce parc énergivore risque d'être dépréciée», estime Nicolas Régnier. Or, 68 % des sociétés de gestion ne connaissent pas la performance énergétique réelle de leur patrimoine sous gestion selon une enquête
Pythagore Machia, Bâtir conseil et S'pace
Expérience. Rénover un bâtiment historique: l'exemple du 52, avenue Hoche à Paris
Si la rénovation énergétique de bâtiments tertiaires classiques n'est pas chose aisée, celle d'un bâtiment classé est encore plus délicate. Ce type de rénovation doit se faire en concertation avec les architectes des bâtiments de France. Le 52, avenue Hoche, ensemble de bureaux de 11 130 m², avec un hôtel particulier de 800 m² conservé en coeur d'îlot, en est un exemple. «Larbre historique de Marie-Antoinette, un catalpa, a été l'objet de tous les soins», précise d'entrée Pythagore Machia, consultant en qualité environnementale et performances énergétiques, pour Bâtir conseil et S'pace pour le compte d'Eurosic et Nexity Entreprises (société foncière et promoteur immobilier du 52, avenue Hoche). Entièrement rénové, cet hôtel particulier est aujourd'hui dédié au Business Center «La volonté de conserver le bâtiment historique découle d'une démarche du maître d'ouvrage couplée aux exigences de l'architecte des bâtiments de France. Le projet a été réalisé en concertation avec la mairie du VIIIe arrondissement», continue Pythagore Machia. Une obligation réglementaire conformément à l'article L621-31 du Code du patrimoine. Débutés en 2008, les travaux ont duré trois ans pour une livraison du bâtiment au premier trimestre 2011. La façade extérieure a été restaurée et préservée à l'identique. Autre détail, la charpente signée Gustave Eiffel a été conservée et solidifiée. L'isolation a été réalisée à l'intérieur du bâtiment, pour obtenir un coefficient de déperdition thermique inférieur à 6,61 % par rapport au standard réglementaire d'un bâtiment neuf. Une climatisation a également été installée. Au final, cet hôtel particulier a obtenu le label NF bâtiment démarche HQE après avoir atteint les 14 cibles. Il vise désormais la démarche HQE Exploitation. [NDLR: montant des travaux non communiqué.]