«Nous avons beaucoup communiqué en interne pour surmonter Les réticences»
Souvent assimilée au comité d'entreprise d'EDF, la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électrique et gazière (CCAS) est une entreprise presque comme les autres, où la professionnalisation des achats est l'une des priorités de la direction Générale.
Je m'abonnePrestations de sécurité et de propreté, gestion des espaces verts, LLD... La CCAS multiplie les appels d'offres dans l'univers des achats hors production. Pourquoi une telle activité?
Jacques Olivier: Depuis la création de notre service achats, début 2007, nous procédons à une mise en concurrence systématique des fournisseurs sur tous les marchés où nous sommes susceptibles d'intervenir. Ceci à l'exception de quelques familles d'achats comme la location de résidences de vacances, les prestations d'avocats, de commissaires aux comptes, d'architectes, etc. Ainsi, la plupart de nos achats indirects doivent désormais faire l'objet d'un appel d'offres, ce qui explique notre activité sur les marchés fournisseurs.
Biographies
Jacques Olivier, 53 ans, est directeur général adjoint de la CCAS depuis 2006. Ingénieur des arts et métiers, il débute sa carrière chez EDF en 1981, avant de rejoindre la CCAS en 2002 au poste de directeur du patrimoine.
Patrick Tarjon, 59 ans, est responsable achats de la CCAS depuis 2006. Il a réalisé l'ensemble de sa carrière au sein de la Caisse qu'il a intégrée en 1972. Il a notamment occupé diverses responsabilités au sein de la direction informatique.
Comment étaient organisés les achats auparavant?
Patrick Tarjon : Chaque service achetait selon ses propres règles. Et il arrivait souvent qu'aucun appel d'offres ne soit organisé. Cette situation préoccupait, depuis plusieurs années, notre direction générale. A la fin 2005, un audit de la Cour des comptes a mis en évidence le manque de maîtrise des achats de la CCAS et la nécessité d'instituer des procédures plus transparentes. Le conseil d'administration et la direction générale se sont alors appuyés sur ce document pour créer un véritable service achats.
Jacques Olivier: Je précise que la CCAS est un organisme de droit privé et que, contrairement à ce que l'on pourrait croire, nous ne sommes pas soumis au code des marchés publics. Nous n'étions donc pas tenus de suivre des procédures formalisées comme c'est le cas pour les acheteurs publics.
Vous êtes partis d'une feuille blanche. Comment avez-vous institué de nouvelles règles?
Jacques Olivier: Tout d'abord, un certain nombre de recommandations ont été émises par notre conseil d'administration. Ensuite, nous avons réalisé un benchmark des meilleures pratiques achats de nos partenaires historiques, en particulier d'EDF. Enfin, nous nous sommes appuyés sur l'expertise d'un cabinet extérieur, KLB Conseil (ex-K-Buy). Désormais, les règles sont simples. Chaque prescripteur définit son besoin, à charge pour le service achats d'organiser l'appel d'offres et de trouver le fournisseur susceptible d'y répondre. Par ailleurs, une commission des marchés a été créée, afin de suivre les appels d'offres dont le montant en jeu est supérieur à 100 kEuros, toujours dans l'idée d'apporter plus de transparence.
L'intervention du service achats a-t-elle été bien vécue?
Patrick Tarjon: Il est évident qu'une telle intervention représente un changement culturel important et que le soutien de la direction générale est indispensable. Pour surmonter les réticences, nous avons donc beaucoup communiqué en interne pour démontrer notre valeur ajoutée, et ce pas uniquement au niveau des économies susceptibles d'être réalisées mais également sur la meilleure qualification des besoins par exemple. Il était très important que les prescripteurs internes ne se sentent pas dépossédés de leur métier. C'est pourquoi nous les associons systématiquement à l'analyse technique des réponses aux appels d'offres.
Quels sont vos objectifs?
Jacques Olivier: Grâce à la massification des achats et à la mise en concurrence systématique des fournisseurs, nous espérons réaliser entre 10 et 15% d'économies dans chaque famille. Notre objectif n'est pas de réduire les coûts à tout prix mais simplement d'acheter au mieux-disant, en intégrant notamment des éléments relatifs à la responsabilité sociale des entreprises et le développement durable. Nous travaillons également à la réduction du nombre de nos fournisseurs qui est encore beaucoup trop important.
La CCAS
Créée en 194 6, la Caisse centrale d'activités sociales du personnel des industries électrique et gazière (CCAS) relève du droit privé. Elle propose à ses bénéficiaires?- 600000 personnes, salariés et retraités d'EDF et Gaz de France et leurs familles principalement - un certain nombre de prestations (villages de vacances, assurances, etc.). Elle gère aussi la restauration collective de ces entreprises, soit plus de six millions de repas par an. La CCAS réalise un chiffre d'affaires annuel de AA0 millions d'euros et emploie 3200 salariés. Son volume d'achats est de 220 millions d'euros par an.
A quelle famille d'achats vous êtes-vous attaqué en premier?
Patrick Tarjon: Aux fournitures de bureau, car nous souhaitions démontrer notre valeur ajoutée en touchant le public le plus large possible. Les résultats sont sur le point de correspondre à nos attentes. Sur un marché d'un million d'euros, nous allons approcher les 15% d'économies et passer de 113 à un seul fournisseur, Lyreco. Enfin, nous avons constitué un catalogue restreint de 600 références contre plus de 7000 auparavant! Tout n'est pas encore réglé, il y a çà et là quelques petites difficultés dans les prises de commande mais nous sommes en bonne voie.
Quels sont vos axes de progrès?
Patrick Tarjon: Ils sont de deux ordres. Tout d'abord, nous travaillons avec notre direction juridique sur l'élaboration de contrats-types pour chaque famille d'achat. Notre objectif est de maîtriser la relation contractuelle avec nos fournisseurs et de ne plus être dépendants de leurs propositions. De plus, nous devons poursuivre l'informatisation de nos achats, à travers le développement de nouveaux tableaux de bord notamment. Jusqu'à présent, nous utilisions principalement des tableurs Excel, avec toutes les limites que cela comporte. Pour la gestion de notre base fournisseurs par exemple, nous venons de passer sur Access.
Allez-vous recruter de nouveaux acheteurs?
Jacques Olivier: Nous avons effectivement l'intention de renforcer notre équipe achats, mais nous réservons en priorité ces postes aux collaborateurs de la CCAS, puis de ses partenaires historiques (EDF, Gaz de France, etc.). Ce n'est qu'en l'absence de candidatures appropriées que nous pourrons alors nous tourner vers le marché de l'emploi.