Equilibre des relations commerciales : que dit la nouvelle proposition de loi du 21 mars 2023 ?
Publié par Gérard Picovschi le - mis à jour à
La question des tensions entre les partenaires commerciaux lorsqu'il y a échec des négociations a refait surface et il y a eu volonté de la part du législateur d'intervenir afin de mettre en place des conditions plus certaines lorsque se présente ce type de situation.
C'est donc dans le cadre d'une expérimentation sur une durée de trois ans, que le Sénat a adopté une proposition de loi n°2023-221 tendant à renforcer l'équilibre dans les relations commerciales entre les distributeurs et fournisseurs. L'objectif était de corriger le déséquilibre existant durant les box annuels de négociation. Ainsi, deux solutions ont été accordées au fournisseur lorsque les négociations n'aboutissent pas.
Un préavis de rupture suffisant au regard des conditions économiques du marché
Antérieurement à cette loi, le fournisseur devait se plier aux conditions de l'année précédente, durant plusieurs mois, bien que les coûts de productions puissent augmenter. La nouveauté est ainsi en faveur du fournisseur qui se voyait mis sous pression par la grande distribution violant la date butoir du 1er mars.
Au fond, ce qui est sanctionné par cette nouvelle loi, c'est le fait de poursuivre les négociations en jouant avec le temps, les distributeurs espérant tirer profit des derniers délais pour obtenir un accord ne tenant pas compte des propositions formulées par les fournisseurs.
Le premier choix des fournisseurs sera désormais d'effectuer un préavis de rupture « classique » qui se verra dans l'obligation de tenir compte des conditions économiques du marché. Effectivement, l'article L.442-1 du Code de commerce prévoit désormais qu'il appartiendra à l'auteur de la rupture, à savoir, le fournisseur, de déterminer un délai de préavis suffisant ainsi qu'un prix proportionnel au prix initialement convenu entre les parties et les conditions économiques du marché.
Il est à noter toutefois qu'au regard des difficultés probables d'intervenir durant la fixation du prix au cours du préavis, cette nouvelle loi précise que les parties auront la possibilité de saisir le médiateur des relations agricoles ou le médiateur des entreprises pour leur permettre de conclure un accord sous son égide, tenant compte des conditions économiques du marché. S'il y a accord le prix convenu s'appliquera de manière rétroactive au 1er mars.
Une Interruption des livraisons en cas de désaccord sur le prix durant le préavis
À l'inverse, en cas de désaccord, le fournisseur pourra conserver le bénéfice de l'option qui lui est ouverte en second choix qui est donc la rupture de la relation commerciale avec son distributeur.
En réalité, ce qui est permis au fournisseur, c'est de mettre fin à la relation, pas de la suspendre. Ce mécanisme expérimental sur une durée de trois ans, n'ouvre pas la possibilité d'une sorte d'exception d'inexécution pour absence d'accord, qui suspendrait le contrat dans l'attente de la conclusion d'un nouveau contrat. Dans le cas où le fournisseur ne trouve pas son avantage lors des négociations du préavis de rupture, ce dernier aura le droit de résilier le contrat sur ce motif.
Toutefois, il faut noter que le distributeur pourra tout de même caractériser la brutalité de la rupture des relations commerciales alors même que le préavis aurait prévu un délai suffisant, dès lors que le fournisseur n'aura pas tenu compte des évolutions du marché. Ceci, entraînerait donc un déséquilibre important au détriment de la victime de la rupture au cours du préavis, le fournisseur devra donc rester vigilant.