Acheteurs / commerciaux : mieux se connaître pour mieux négocier
Publié par MATHIEU NEU le | Mis à jour le
Pugnaces, pointilleux, factuels... Les qualificatifs attribués aux acheteurs traduisent l'intensité des bras de fer auquel ils se livrent. Mais au-delà de leur bataille lors des négociations, l'évolution des achats modifie l'approche des commerciaux et change le visage de leurs échanges.
Jeudi 19 novembre, les acheteurs et leurs problématiques étaient une nouvelle fois à l'honneur lors d'un événement organisé par la Cdaf (Compagnie des dirigeants et acheteurs de France) à l'ESCP Europe. Mais, une fois n'est pas coutume, il s'agissait de s'appuyer sur le regard des commerciaux pour passer ceux-ci au peigne fin. La Cdaf Île-de-France et les DCF Seine-et-Marne et Essonne ont profité de l'occasion pour signer une charte pour un engagement mutuel envers la connaissance et la compréhension de l'autre. Une façon de garantir un terrain d'échange constructif pour l'avenir.
"L'un des qualificatifs qui revient souvent dans la bouche des commerciaux pour décrire les acheteurs est le caractère pointilleux", relève Patrick Vital, président de l'association DCF Essonne et consultant associé de la société de conseil et de formation Levito. Du point du commercial, l'adjectif est plutôt avancé comme une critique. Du point de vue de la direction des achats, il est davantage vu comme quelque chose de favorable, puisque l'étude méticuleuse des nombreux aspects à considérer est indispensable pour bien acheter.
D'autres caractéristiques fréquemment évoquées sont la pugnacité et le côté factuel dans les échanges. "Contrairement à une relation entre un commercial et un chef d'entreprise qui peut souvent revêtir un aspect émotionnel dans les sujets évoqués, les discussions commerciaux - acheteurs se distinguent par une grande rationalité. Les acheteurs veillent à éviter de construire un type de relation dans lequel la capacité d'analyse pourrait être mise à mal", poursuit Patrick Vital.
Pour Bernard Talagas, membre du codir de la Cdaf Île-de-France et responsable achats au sein de Thales Global Services, le côté structuré et rigoureux est effectivement une caractéristique importante au sein de la population des acheteurs. Un aspect qui s'explique par la nature de la démarche: "on n'achète pas dans la sphère professionnelle comme on procède pour un achat personnel qui s'apparente parfois à un coup de coeur, un déclic. On achète pour une entreprise, pour un prescripteur qui attend une qualité, un coût acceptable."
Des profils en mutation
"Depuis un certain temps, les acheteurs se professionnalisent et les vendeurs doivent s'adapter", remarque Patrick Vital. "En 2004, lors de la création de ma société, je formais 95 % de vendeurs et 5 % d'acheteurs. Aujourd'hui, les pourcentages sont de 65 % de vendeurs pour 35 % d'acheteurs. Pendant longtemps, on demandait aux acheteurs d'être des approvisionneurs. Aujourd'hui, on leur demande bien plus. Ils doivent se doter de compétences relatives aux calculs de coûts, de ratios, en intégrant les achats dans une vision globale de l'entreprise, tout en optant pour des solutions pertinentes sur un plan technologique ou technique."
André-Yves Portnoff, conseiller scientifique de Futuribles International et professeur associé au sein du MBA HEG de Fribourg, confirme cette évolution qui oblige les commerciaux à changer d'attitude et de posture face aux acheteurs : "On ne demande plus seulement aux acteurs d'être des experts dans un domaine, mais d'avoir un profil en "T " : une connaissance verticale approfondie de leur spécialité mais aussi la culture générale indispensable pour communiquer avec les autres parties prenantes, comprendre leurs besoins et contraintes, expliquer et faire admettre les siennes."
Les acheteurs sont aussi devenus des vendeurs. En interne par exemple, ils doivent convaincre un certain nombre de collaborateurs du bien-fondé de leurs choix pour les produits et solutions adoptés. Très souvent, le commercial le sait et insiste alors sur les intérêts que ses collaborateurs peuvent y trouver.
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