Marketplaces B2B : la fin de l'émergence ?
Publié par Guilhem Lavabre, TNP Consultants le - mis à jour à
Est-ce la fin de la fonction achats, fonction support à coût fixe ? Les marketplaces vont être des modèles de comparaison à coût réduit sans concession. Elles seront aussi l'opportunité de générer ses propres revenus, supérieurs aux budgets actuels, profitables pour les clients internes.
Un principe vieux comme le monde, un outil qui ressemble beaucoup à ceux qu'on a déjà. Beaucoup de bruit pour rien ? En apparence, il n'y a pas lieu de s'inquiéter plus que ne l'ont fait les libraires de quartier au milieu des années 90 en voyant les premiers pas maladroits d'une modeste librairie en ligne.
Comment doit réagir une fonction qui a acquis chèrement au cours des dernières décennies le contrôle des transactions d'achats au sein de ses entreprises ?
L'analogie fait sens. La stratégie de développement des fonctions achats par la professionnalisation et la couverture touche ses limites depuis de nombreuses années et la plupart des entreprises en sont conscientes.
Cela ne date pas des marketplaces, le taux d'utilisation des contrats-cadres plafonnant depuis longtemps. La contraction des effectifs limite toujours plus la portée d'une stratégie de couverture fondée sur contrôle du processus.
Les marketplaces marquent un tournant : ce sont la première technologie qui offre une solution de couverture réellement étendue. Demain, la relation achats sera directe, fluide, transparente entre le fournisseur et l'utilisateur.
Cinq critères pour définir une marketplace B2B
En apparence, une marketplace est une plateforme où on remplit son panier et qui offre des services sur la livraison et la facturation. Comme un e-procurement, en plus convivial, en somme ? La différence réside dans la finalité. Un e-procurement encadre le processus achats pour maximiser l'utilisation de contrats. Une marketplace capte un flux transactionnel libre pour développer des services et des leviers de création de valeur.
1 - Un système ouvert
Les coûts de transaction / connexion sont marginaux, les analyses riches et instantanées, la visibilité très forte : il n'est plus nécessaire de filtrer l'accès aux fournisseurs ni de restreindre les utilisateurs par des gestions de droits et des workflows de validation.
2 - Un outil user centric
Là où un e-procurement fait prévaloir la sécurisation sur le confort des utilisateurs, les marketplaces B2C privilégient l'adoption. C'est une conception radicalement différente, partant de l'expérience utilisateur dont il faut tirer tout le potentiel.
3 - Un service end-to-end
Une marketplace est au service du métier. Elle peut fournir plus de services - digitaux ou back-office. L'adoption dépend de la capacité à offrir un expérience utilisateurs fluide, riche et personnalisée.
4 - La valeur de l'information
L'information abondante sur les consommations invite à revoir ses stratégies. Le bénéfice s'obtient au prix d'un effort de marketing permanent, c'est un nouveau métier.
5 - La valorisation de l'intermédiation
L'ouverture des bases fournisseurs et clients invite à de nouvelles animations du marché. L'acheteur devient un distributeur. C'est un changement de pratiques de négociation.
Trois défis pour la fonction achats
1. Un challenge culturel pour la fonction achats
Renoncer à la culture du guichet
En rendant direct le contact utilisateur-fournisseur, les marketplaces poussent l'acheteur à se repositionner : de gate-keeper à facilitateur avec au passage une nouvelle posture de distributeur.
Dépasser le triptyque massification / concurrence / négociation du prix
Les stratégies de recours aux contrats-cadres sont souvent plus une adaptation à la pauvreté de l'information que le meilleur usage possible de sa puissance d'achat. Savoir, communiquer et être plus proche : cela offre aux acheteurs de nouveaux leviers et améliore la structure de coût des fournisseurs, leurs coûts de distribution, les aléas.
2. Une équation économique à résoudre
Viser un business case cash positive
Le modèle économique marketplace permet de réduire et variabiliser le coût complet du processus S2P. Il est faisable et souhaitable de fonder son projet sur un business case cash positive. Pour cela, il est nécessaire de lever les contraintes d'une approche informatique classique et piloter le projet par le cash.
Evoquer le make or buy de la fonction achats
Une marketplace modifie profondément les processus au point qu'elle remet en cause la logique de ressources, notamment sur la couverture des achats à faible montant et le traitement des factures.
En profiter pour revisiter le business model de la fonction achats
Est-ce la fin de la fonction achats, fonction support à coût fixe ? Les marketplaces vont être des modèles de comparaison à coût réduit sans concession. Elles seront aussi l'opportunité de générer ses propres revenus, supérieurs aux budgets actuels, profitables pour les clients internes.
3. Un projet d'un genre nouveau
Faire du projet une expérience entrepreneuriale
Lancer une marketplace est une rupture. Lui imposer des contraintes de continuité la ralentit, voire la paralyse. Il faut lever les contraintes : gouvernance autonome, nouveaux usages, stratégie propre de ressources. Libérée, cause ou conséquence, elle devient un levier de transformation des achats.
Conduire le projet comme une start-up
Les projets réussis le confirment : il faut adopter les codes et les principes qui ont fait leur preuve dans le développement de plateformes B2C : procéder par MVP, ne pas déployer de processus standardisés.
En profiter pour reprendre la main sur son système d'information
Les marketplaces remettent au centre du terrain l'expérience utilisateur achats et la valorisation de l'information achats. Cela ne peut être fait que par et pour des experts du métier.
Lire la suite en page 2 : Cinq conseils pratiques avant de vous lancer