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Les enjeux liés aux données modifient les business models des acteurs du travel

Publié par Camille George le | Mis à jour le

Dans l'écosystème du travel, la donnée est au centre du jeu. Les évolutions technologiques permettent le développement de nouveaux services qui challengent le marché. Pour les acteurs de l'ensemble de la chaîne de valeur, il est devenu impératif de faire évoluer leur modèle économique, pour les travel managers, c'est une opportunité de faire monter le travel dans la stratégie de l'entreprise.


Contrairement à d'autres familles d'achats pour lesquelles il est parfois difficile de récupérer des données, dans le voyage d'affaires les données sont légion. C'est une chance, mais la multitude des sources en rend la gestion complexe. Celles-ci sont récupérables auprès de la TMC, des fournisseurs de voyage, des spécialistes de l'expense (dont Concur, KDS ou SAP) ou encore des systèmes de paiement. "À cela il faut ajouter un niveau de granularité qui varie en fonction des canaux, souligne Philippe Berland, associé expert en aérien chez Sia Partners. L'objectif est alors de concilier les différentes sources et de réconcilier les différentes visions de la donnée."

La capacité des acteurs à faire ce travail est essentielle. "Ça l'est pour plusieurs raisons : d'un point de vue localisation et sécurisation des données, d'un point de vue propreté des données -la collecte est une chose, encore faut-il rendre les données utilisables. La vitesse pour nettoyer et organiser les données est également un facteur clé. Enfin, les capacités en termes de reporting sont essentielles, détaille Valérie Sasset, directrice générale France de BCD Travel. Quel outil pour quel coût ? Car l'enjeu du travel manager porte bien sur l'usage de cette donnée." Aujourd'hui, tous les acteurs s'organisent donc pour offrir un niveau de collecte pertinent de données exploitables.

Une nouvelle tranche d'acteurs

Le marché évolue, les modèles économiques sont en train de changer.

"Si les agences ne font pas du vrai service humain avec un apport technologique très fort, elles auront du souci à se faire. De fait, on constate différentes réactions de la part des TMC: certaines comme Travel Planet et FCM Travel se sont adaptées en faisant un saut technologique, Amex GBT l'a fait en complétant ses compétences avec les rachats de KDS l'an dernier, puis HRG cette année, d'autres ont fait un PSE pour tirer les coûts vers le bas et rester compétitives. Quant à celles qui n'ont pas suffisamment anticipé le changement, elles sont en difficulté", analyse Julien Chambert de CBT conseil. Côté GDS aussi ça bouge. S'ils ne vont pas devenir les nouvelles TMC, ils ne sont déjà plus de simples agrégateurs pour les compagnies aériennes, mais évoluent en fournisseurs d'IT.

De même, de belles évolutions sont à prévoir chez les fournisseurs de logiciels. La norme NDC va enrichir la donnée. "Cela veut aussi dire un canal de plus à gérer. S'il n'y a pas un acteur pour centraliser la donnée, la trier et la traiter, cela sera plus que problématique", prévient Julien Chambert. Or toutes les entreprises ne seront pas capables d'investir. Aujourd'hui, peu d'acteurs sont capables de consolider, trier et traiter la donnée, et ceux qui le font, à l'image de Microsoft ou IBM qui ont des BI capables de faire ce travail, ne sont pas spécialistes du travel. De nouvelles solutions émergent et la différence majeure avec un outil de BI classique porte sur la restitution des données, pensée spécifiquement pour le travel. "Ces solutions logicielles proposent différentes façons de consolider l'information en fonction du destinataire (RH, service achats, direction générale, etc.). L'autre avantage est qu'elles sont neutres vis-à-vis des différents prestataires du voyage", estime Julien Chambert. Les mises en avant ne se font pas en fonction de contreparties financières octroyées. D'aucuns pointant du doigt le fait que les agences de voyage, si elles offrent la visibilité la plus large, sont encore tributaires de leur relation avec les fournisseurs.

Big data et IA pour des services enrichis

L'enjeu majeur porte sur le temps réel. Selon les experts, il y aura des cas d'usages intéressants avec les bots notamment. La plateforme Supplier Management d'Amex GBT est un exemple intéressant par son approche plus proche de celle d'un éditeur que d'une agence. Celle-ci permet de capturer des informations voyageur, de créer des bases de données dédiées et d'établir différents niveaux de reporting de façon globale. "Notre appli mobile est rattachée à la plateforme, pas à un GDS en particulier, nous permettant d'offrir la même expérience d'un GDS à un autre. Nous travaillons la technologie du Know me qui permet de façon automatique de repérer les préférences voyageurs et proposons depuis peu un service re-shop pour ré-émettre un billet si le prix a changé. Nous sommes aujourd'hui les seuls à le faire de façon automatisée", explique Christophe Tcheng, VP product & plateform chez Amex GBT. En termes de reporting, on peut aller très loin en matière de recommandation dynamique via des tableaux de bords personnalisés. "En consolidant un ensemble des meilleures pratiques voyage et règles de l'entreprise selon une zone géographique, on peut aiguiller le gestionnaire de voyage. Avec des tableaux de bords customisés, on peut corréler des données clients tierces avec les données voyage pour savoir par exemple si un bon vendeur voyage beaucoup", ajoute Christophe Tcheng.

Toutes ces évolutions du marché sont une opportunité pour le travel manager de cartographier l'ensemble des données et les actions à mener. Qu'avons-nous et que voulons-nous en faire ? "En combinant les sources de données, on peut avoir l'ensemble de la vision d'une catégorie et travailler la donnée en profondeur afin d'optimiser les dépenses et avoir un meilleur ROI. Cela permet de changer de dimension et d'avoir une réflexion beaucoup plus stratégique en répondant à des questions comme : que révèle la donnée voyage sur la gouvernance d'une entreprise ?", estime Géraldine Valenti, en charge de la division conseil de CWT. Des possibilités d'analyse beaucoup plus larges pour les travel managers, donc.

Mais attention à ne pas se noyer...

Face à cette richesse nouvelle, il est important de mettre en place une stratégie d'analyse avec une solution logicielle qui permettra au travel manager de se concentrer sur le budget. "Si l'objectif est de creuser finement la donnée pour réévaluer la dépense et travailler la politique voyage, cela vaut la peine de s'investir dans un projet d'envergure. Si l'enjeu est juste d'avoir une visibilité sur les dépenses globales, les systèmes de remontées de données existants sont suffisants", conseille Julien Chambert. Quant à savoir si externaliser la réalisation des reportings auprès de la TMC pour se concentrer sur le travail d'analyse est judicieux, cela dépend du périmètre couvert :

"Si les reportings ne couvrent qu'une partie du périmètre, il faut déterminer si l'intérêt est réel et de quelle façon on va compléter l'information, estime Philippe Berland de Sia Partners. Il y a un arbitrage effort/gain à faire pour savoir comment faire évoluer efficacement la maîtrise des dépenses voyage en profitant des nouvelles offres et technologies du marché."


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