Acheter en Chine par temps de Covid
Publié par Olivier Wajnsztok, AgileBuyer le - mis à jour à
Le sourcing en Chine est devenu de plus en plus compliqué par temps de Covid, et dans un contexte d'inflation galopante. Quel est l'état de l'art actualisé ?
Les directions achats sont-elles capables de mesurer les économies réalisées grâce à des achats effectués en Chine, par rapport à un sourcing "Europe" en prenant en compte la part des risques ? L'opération paraît très simple. Pourtant, dans la réalité, le calcul est très complexe et de nombreux coûts indirects, coûts cachés et risques sont trop souvent exclus des analyses qui ont servi à prendre la décision. Si les coûts directs sont clairement identifiés (coût d'achat, frais de transport, taxes et frais de douanes), il n'en est pas de même pour les autres critères amenant au fameux TCO (Total Cost of Ownership).
Dépenses cachées et déplacements supplémentaires
Comme leur nom l'indique, ces coûts dits "cachés'' ne sont pas immédiatement visibles mais l'expérience prouve qu'ils ne peuvent être écartés. Les coûts de la main d'oeuvre indirecte seront plus importants : difficultés de communication, opérations de dédouanement et de contrôle supplémentaires entraîneront un besoin de temps en main d'oeuvre et donc, un surcoût. Si les frais de douane sont connus à l'avance et identifiés, les honoraires des transitaires sont rarement inclus dans les calculs des frais de transport et sont pourtant bien réels.
Des déplacements supplémentaires seront nécessaires selon l'industrie. Le déplacement chez le fournisseur d'auditeurs, de techniciens et de qualiticiens représentera un coût important pour l'acheteur.
Les coûts indirects, non pris en compte ou non calculés
L'impact sur le cash-flow d'un sourcing en Chine n'est pas négligeable, tout comme l'impact sur la supply chain. D'un côté, l'utilisation des incoterms FOB/FCA entraînent une avance de la date de paiement pour l'acheteur pouvant aller jusqu'à 60 jours. De plus, le sourcing lointain ne permet pas d'utiliser des outils logistiques modernes, tels VMI et Stocks consignés, qui permettent à l'acheteur de gagner en délai de paiement. Exit la livraison par une ou deux palettes provenant des pays lointains, la taille de lot sera supérieure. Le stock de sécurité sera augmenté, à cause du délai de réapprovisionnement plus important. À l'arrivée, l'impact est donc négatif sur le cash.
La supply chain n'est pas en reste puisqu'elle va supporter de nombreux risques : perte de réactivité (impossibilité de prévoir une livraison expresse en 24 h), gestion des retours pour non-qualité, perte de flexibilité dans le planning court terme et sécurisation des approvisionnements.
Risques macro-économiques mais réelles économies possibles
La situation dans les pays occidentaux est relativement prévisible, teintée de faible croissance et d'évolution presque prévisible des indices de coûts de production. La situation des pays émergents, notamment les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud, ndlr), est très différente. Les taux de change et leur très forte volatilité sont quasiment impossibles à prévoir. Des solutions existent - couvertures de change - mais représentent un coût financier à ne pas négliger. L'évolution des salaires pouvant atteindre jusqu'à 10 % par an représente un risque qui doit impérativement être couvert dans les contrats. Même si la Covid a calmé ces chiffres.
Tous ces éléments ne sont, bien sûr, pas rédhibitoires pour sourcer en Chine. Il convient simplement de les prendre en considération dans le business case entraînant la décision du pays de fabrication. Généralement, les coûts cachés ou indirects ne seront compensés uniquement que si les économies réalisées sur le coût d'achat seront au moins égales à 15 % du prix européen.
Dès lors, une fois les risques pris en considération, de réelles économies peuvent être au rendez-vous. Même par temps de Covid...
Par Olivier Wajnsztok, directeur associé du cabinet AgileBuyer, spécialisé dans les équipiers achats (acheteurs professionnels qui traitent des projets achats chez les clients), le conseil et le coaching d'acheteurs.
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