[Juridique] Post Covid-19 : comment faire évoluer les relations avec vos fournisseurs ?
Publié par Gérard Picovschi, avocat Selas Avocats Picovschi le - mis à jour à
L'épidémie de coronavirus a bouleversé les échanges avec les fournisseurs. Pour les acheteurs, il convient de bien mesurer les risques et de maintenir une relation équilibrée avec leurs prestataires afin de surmonter cette période difficile.
Depuis sa propagation dans le monde et en France au courant du mois de mars, l'épidémie de coronavirus a notamment impacté les relations commerciales. En effet, les échanges avec les fournisseurs ont été bouleversés et il convient ainsi pour les acheteurs de se montrer professionnels, de bien mesurer les risques et de maintenir une relation équilibrée avec leurs prestataires afin de surmonter cette période difficile. Le Covid-19 a en effet eu divers impacts sur les relations avec les fournisseurs, en entraînant la rupture de stocks en chaîne de certains produits ou en déclenchant une explosion de la consommation pour d'autres. Dans ce contexte, les partenaires commerciaux peuvent rechercher à aménager leur cadre contractuel afin de poursuivre leurs relations commerciales.
Face à la pandémie de Covid-19, il est nécessaire d'anticiper le développement d'un contentieux d'affaires dû à d'éventuelles ruptures brutales de relations commerciales. Il est donc recommandé de favoriser une certaine transparence et des discussions de bonne foi dans un objectif de continuation et de reprise efficace des relations d'affaires. Dans un premier temps, l'ordonnance 2020-306 a permis de neutraliser l'application des astreintes et clauses pénales, résolutoires ou de déchéances lorsqu'elles ont pour objet de sanctionner l'inexécution d'une obligation durant la période juridique protégée.
Clause de force majeure
Pour les contrats à venir et en cours de négociation, une clause de force majeure peut être prévue reconnaissant la pandémie du Covid-19 et ses conséquences comme un événement de force majeure. Cependant, les parties ont la possibilité de renoncer au moyen d'une clause au bénéfice de la force majeure et en cas de non-réciprocité, celle-ci pourrait être constitutive d'une déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Pour les contrats conclus après le 1er octobre 2016 (date d'entrée en vigueur de la réforme du droit des obligations) dont les parties n'ont pas accepté d'assumer l'imprévision, il conviendra, en vertu de l'article 1195 du Code civil, de renégocier le contrat si l'épidémie de Covid-19 rend excessivement onéreuse la poursuite du contrat par le fournisseur, qui devra démontrer que l'épidémie était imprévisible au moment de la signature du contrat et le caractère excessivement onéreux de la poursuite du contrat.
De plus, la loi d'urgence n°2020-290 ne comporte aucune disposition modificatrice des délais de paiement, donc à moins que de nouvelles ordonnances soient adoptées sur le sujet, aucun opérateur ne pourra invoquer la pandémie pour écarter les dispositions légales du code de commerce relatives aux délais de paiement. Le ministre de l'Économie a d'ailleurs affirmé que les entreprises ne respectant pas les délais de paiement n'auront pas accès à la garantie de l'État pour les prêts bancaires des entreprises.
Redoubler de vigilance
Enfin, concernant l'incapacité du fournisseur d'honorer sa livraison ou prestation, l'article 1218 du Code civil prévoit une simple suspension du contrat en cas d'empêchement temporaire, mais la résiliation du contrat peut être prononcée dans certains cas : si le retard causé par la suspension est suffisamment grave, c'est-à-dire que la continuation du contrat pourrait mettre en péril votre activité, ou si l'empêchement d'exécution du fournisseur est définitif. Ainsi, au regard des diverses problématiques qui peuvent survenir, en tant que directeur des achats, vous devez redoubler de vigilance.
Par Gérard Picovschi, avocat Selas Avocats Picovschi
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