[Dossier] Achats responsables : des enjeux forts pour les achats de production
Publié par Camille George le - mis à jour à
L'enjeu pour les entreprises porte sur la mise en oeuvre de politiques RSE globales. Une approche transversale impactant les services achats qui font évoluer pratiques et process, en commençant par les achats stratégiques. Focus sur les initiatives déployées au sein de grands groupes industriels.
La responsabilité sociale et environnementale des entreprises n'est pas un sujet nouveau même si, au départ, la démarche était surtout menée pour une question d'image. Aujourd'hui, la tendance est profonde et transforme les méthodes de travail, notamment au niveau des achats et particulièrement en ce qui concerne les achats de production.
Si les pratiques d'achats responsables ont mis du temps à se développer, c'est bien parce que jusqu'à récemment, les objectifs poursuivis étaient contradictoires. En effet, on demandait aux acheteurs de prendre en considération la politique RSE de l'entreprise mais bien souvent sans définir de ligne de conduite spécifique et sans les objectiver sur des critères précis. Par ailleurs, les contraintes économiques et les objectifs de réductions des coûts à court terme restaient la priorité. Or, la question des achats responsables ne se comprend que sur le long terme.
C'est donc toute une logique achat, tout un mécanisme et un état d'esprit d'entreprise qu'il a fallu revoir pour construire pas à pas un nouveau schéma. Ainsi, jusqu'en 2015, les contraintes budgétaires et le manque d'indicateurs de mesure étaient les principaux freins à la mise en place de process d'achats responsables, selon le baromètre annuel de l'ObsAR. Mais en deux ans seulement, les contraintes budgétaires qui étaient identifiées comme frein numéro 1 par 51 % des répondants au baromètre passent en troisième position en 2017, à seulement 35 %, juste au-dessus du manque d'expertise en interne. "On sent une montée en puissance des achats responsables durables (ARD) très forte. La barrière budgétaire est en train de tomber. Il est désormais moins difficile de trouver un budget pour sa politique ARD. Par ailleurs, on voit aussi un renforcement des ARD dans l'échelle de priorisation des critères d'achats qui arrivent peu à peu au même niveau que l'objectif de réduction des coûts", indique Pierre Pelouzet, président de l'ObsAR.
Une tendance de fond, donc, poussée par plusieurs facteurs dont la professionnalisation de la fonction et une plus grande implication des directions générales sur ces problématiques mais aussi par l'évolution des normes et réglementation. La loi Sapin II anti-corruption et la loi sur le devoir de vigilance qui implique une plus grande responsabilité des donneurs d'ordre vis-à-vis des pratiques de leurs sous-traitants au sens large ont eu l'effet d'un accélérateur sur le développement de méthodologies et d'outils de suivis spécifiques. La norme ISO 20400 offre, quant à elle, un guide de recommandations pour permettre aux achats de mieux intégrer les spécifications RSE dans toutes les étapes du process achats. L'ObsAR favorise également l'essor d'initiatives en menant de nombreux travaux pour construire outils et indicateurs spécifiques et en proposant un think tank pour partager les bonnes pratiques.
Si la mise en pratique des achats responsables durables est encore hésitante au global, principalement en raison d'une logique TCO et cycle de vie produit qui peine à s'installer, les curseurs bougent indubitablement. "Nous n'en sommes pas encore à des process systématisés mais ils s'enclenchent, indique Pierre Pelouzet. Nous sommes à la deuxième croisée des chemins qui avancera si tout le monde travaille ensemble. La troisième sera de mesurer les résultats, la valeur apportée." Certains groupes industriels ont d'ailleurs déjà bien avancé sur ces thématiques et tentent d'être moteur pour l'ensemble de leur filière. En voici quelques illustrations, à découvrir dans les pages qui suivent.
Sommaire :
1- Michelin, pionnier en termes de politique RSE
2- L'Oréal mise sur une démarche collaborative pour un suivi plus responsable de sa supply chain
3- Lafarge Holcim a développé une entité dédiée à la valorisation des flux de production
4- Legrand privilégie le binôme acheteurs/expert QSE en interne
5- Encadré : Danone et le cycle de vie produit