La Covid-19 bouscule la restauration d'entreprise
Publié par Fanny Perrin d'Arloz le | Mis à jour le
La restauration de demain ne devrait plus ressembler à celle d'hier. En cause : un contexte sanitaire tendu impactant les capacités d'accueil des établissements et les habitudes des hôtes. D'autant que les tendances de consommation évoluent avec l'organisation du travail et les mentalités.
Au 17 mars 2020, les restaurants d'entreprise ont été désertés presque instantanément par la plupart des équipes. À l'exception des services pour lesquels le télétravail était contre-indiqué. "Certains de nos clients sont restés ouverts pendant le confinement, mais très rarement avec 100% des effectifs présents : la flexibilité de notre modèle nous a permis d'adapter nos approvisionnements pour des volumes divisés par trois, voire par quatre. Depuis septembre, les volumes reviennent, mais cela reste très fluctuant : c'est du cas par cas !", énonce, en préambule, Amaury Lefébure, responsable des ventes chez Foodles. Le confinement allégé, les grands groupes ont progressivement rouvert leurs restaurants avec des capacités d'accueil limitées, un agencement et une signalétique conformes aux règles sanitaires. Cela s'apparentait à un réel défi pour les RIE de la Défense.
"Il a fallu définir des créneaux courts et ultrastricts pour chacune des entreprises utilisatrices, afin d'éviter une affluence trop importante", explique Victoria Benhaim, fondatrice d'i-lunch. De fait, les entreprises apprennent à composer avec le protocole établi et les effectifs présents, et à rassurer les collaborateurs. "Nous avons dû remettre en place les emballages biodégradables ; même le morceau de pain est désormais emballé sous papier kraft", ajoute Victoria Benhaim qui se targue habituellement d'une solution de restauration zéro déchet.
Mutations profondes et durables ?
Eurest explique ne pas encore avoir récupéré les volumes d'avant la crise. "Cela nous incite à faire preuve d'agilité dans notre mode de fonctionnement et de contractualisation ; nos clients souhaitant instaurer des mesures complémentaires liées à la crise sanitaire, comme du personnel additionnel pour assurer la distribution des plateaux, la gestion des flux ou la désinfection. Plus que jamais, il faut se montrer ouvert à l'innovation, car le mode de consommation est challengé", avance Camille Berthaud, directeur général d'Eurest.
À court terme, les offres alternatives ont éclos pour pallier un service de restaurant traditionnel à l'arrêt ou diminué. Comme Foodless qui propose jusqu'à 16 plats traiteurs par semaine. "Comptez 3 000 euros par mois pour un frigo connecté de 50 couverts. En combinant des frigos connectés avec des modules complémentaires de type "salad bar", nous couvrons des sites de 800 collaborateurs", indique Amaury Lefébure. Déjà utilisé ces dernières années, les systèmes click and collect et click and serve ont et font aussi des émules, limitant les contacts et fluidifiant les trafics. Plus globalement, "la livraison a été la solution déconfinée compatible", souligne Victoria Benhaim.
Pour éviter un nombre trop important de livreurs postés devant l'entrée aux heures de repas, il peut être opportun de contractualiser avec une plateforme de livraison, comme i-lunch qui le prévoit par camion réfrigéré. Cela signifierait-il que le self-service traditionnel, uniquement disponible durant la pause-déjeuner, aurait fait son temps ? L'affirmative semble l'emporter, selon Victoria Benhaim : "Les directeurs achats vont de plus en plus devoir proposer des offres multicanaux, accessibles tout au long de la journée." La Covid n'est pas la seule fautive. "La crise sanitaire ne fait qu'accélérer les tendances d'hier : la diminution de la fréquentation des selfs traditionnels, la contrainte croissante sur les coûts fixes, les attentes des nouvelles générations pour des modes de consommations et d'usages nomades, digitaux et responsables, et des organisations en mutation", confirme-t-on au sein d'Elior Group.
En effet, l'avènement du home office et du flex office modifie en profondeur l'organisation du travail et, par ricochet, les effectifs présents sur site, susceptibles d'être en demande d'un service repas. "L'objectif n'est plus d'encadrer des prix, mais de proposer la bonne offre restauration", résume Camille Berthaud. Encore plus que par le passé, les collaborateurs veulent retrouver des produits qualitatifs, locaux, frais et fréquemment renouvelés. L'étude Altavia menée en juin 2020 le démontrait : 69% des Français envisageaient de consommer de façon différente et plus responsable à l'issue du confinement. De fait, la restauration d'entreprise tend à se rapprocher des standards de la restauration commerciale. "Les millénials plébiscitent la street food, les poke bowls, les recettes méditerranéennes, les plats végétariens", énumère Camille Berthaud.
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