Le nouveau référé, outil de protection du secret des affaires
Publié par Justine Deubel et Laurent Frölich, cabinet d'avocats Laurent Frölich le - mis à jour à
Le référé secret des affaires est un outil de protection contre une atteinte imminente ou illicite à un secret des affaires qui offre des pouvoirs d'injonction au juge administratif. Les acheteurs publics doivent désormais en tenir compte dans leurs procédures de passation de contrats publics.
Le référé secret des affaires est prévu à l'article R.557-3 du Code de la commande publique : ''Lorsqu'il est saisi aux fins de prévenir une atteinte imminente ou faire cesser une atteinte illicite à un secret des affaires, le juge des référés peut prescrire toute mesure provisoire et conservatoire proportionnée, y compris sous astreinte. Il peut notamment ordonner l'ensemble des mesures mentionnées à l'article R. 152-1 du Code de commerce''. Le secret des affaires prendra une place très importante pour les entreprises dans le cadre de leur stratégie économique en commande publique. Ce référé, visant pour le requérant à faire respecter le secret de ses affaires, est susceptible d'intervenir à tout moment au cours de la passation d'un contrat public.
L'atteinte au secret des affaires
Pour former un référé secret des affaires, l'opérateur économique doit démontrer une atteinte illicite imminente ou actuelle au secret des affaires. L'article L. 151-1 du Code de commerce précise qu'est couverte par le secret des affaires toute information qui cumule trois conditions :
- L'information doit être secrète ;
- Avoir une valeur commerciale effective ou potentielle ;
- Être protégée raisonnablement par son détenteur légitime.
Le Code de la commande publique impose aux acheteurs publics une obligation stricte de confidentialité. La méconnaissance d'une telle obligation entache la procédure d'irrégularité et peut donner lieu à des sanctions pénales et/ou disciplinaires.
Les pouvoirs du juge particulièrement étendus
Dès lors que l'atteinte illicite imminente ou actuelle au secret des affaires est caractérisée, le juge des référés dispose d'une palette de pouvoirs assez large et pourra donc ordonner les mesures provisoires et conservatoires prévues à l'article R. 152-1 du Code de commerce :
- Interdire la réalisation ou la poursuite des actes d'utilisation ou de divulgation d'un secret des affaires ;
- Interdire les actes de production, d'offre, de mise sur le marché ou d'utilisation des produits soupçonnés de résulter d'une atteinte significative à un secret des affaires, ou d'importation, d'exportation ou de stockage de tels produits à ces fins ;
- Ordonner la saisie ou la remise entre les mains d'un tiers de tels produits, y compris de produits importés, de façon à empêcher leur entrée ou leur circulation sur le marché.
L'article précité prévoit également un mécanisme de garantie visant à subordonner la poursuite de l'atteinte au secret des affaires à la constitution par le défendeur d'une garantie visant à indemniser le détenteur du secret. Il peut aussi subordonner l'exécution des mesures provisoires et conservatoires à la constitution par le demandeur d'une garantie aux fins d'indemniser le défendeur, dans le cas où l'action serait jugée non fondée ou s'il était mis fin à ces mesures.
Une telle étendue des pouvoirs d'injonction confiés au juge des référés témoigne véritablement d'une volonté de protéger le secret des affaires devant le juge administratif.