Billet d'humeur - L'UE cette libértarienne qui s'ignore ?
Publié par Geoffroy Framery le | Mis à jour le
Droits de douane réhaussés oblige, la CSRD est sacrifiée sur l'autel de la concurrence et de la Boussole de Compétitivité de l'UE. Billet d'humeur.
Il y a la lettre et... l'esprit. De la lettre, nous retenons que le 5 mars 2024 naquit une chambre dédiée aux "contentieux émergents", incluant notamment ceux liés à la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) et au devoir de vigilance. Une avancée significative. La chambre « 5.12 » voyait le jour... La volonté d'agir dans un terrain de jeu complexe à la croisée du droit des affaires, du droit social et du droit environnemental n'était plus une énième exhortation.
De l'esprit, visiblement l'UE n'en eût jamais un atome, du moins pour le moment. Car le plus lamentable, c'est bel et bien que la CSRD a été vidée de sa substance. Un report des vagues 2 et 3 à deux ans et des entreprises concernées en premier lieu, celles d'au moins 250 salariés, reléguées dans une vague ultérieure pour ne plus que soumettre les entreprises de 1000 salariés et plus, qui génèrent plus de 50 millions d'euros. Pour ne citer qu'un renoncement...
Rappelons que seules 6300 entreprises en France ont un effectif de plus de 250 salariés soit 0,2% des entreprises (source CCI.fr). La faute à qui ? La faute à la Déclaration de Budapest peut-être. Surtout, une annonce qui fait écho à la Boussole de Compétitivité de l'UE qui ambitionne un choc de simplification avec à la clé 37 milliards d'économie pour les entreprises en Europe.
Un rétropédalage de la CSRD qui ne sert pas à grand-chose ?
Le rétropédalage et les demandes de moratoire de ce début d'année cristallisent finalement un débat vieux comme le capitalisme, celui du court et du long terme, celui de la simplification et celui de la régulation avec en ligne de mire des coûts de mise en conformité et une appréhension aiguë sur le risque de distorsion concurrentielle entre pays. En particulier à l'échelle de l'Union Européenne. Finalement la directive Omnibus n'a jamais été aussi à propos lorsque la Maison Blanche annonce le 27 février des droits de douane majorés de 25% pour les produits européens destinés à partir vers les États-Unis. La contrainte doit être un levier de compétitivité et de renouveau des modèles d'affaires.
En fil d'Ariane, la compétitivité de l'entreprise demeure un impératif catégorique. Normal ! Pas étonnant que les acheteurs placent la maîtrise des coûts et la création de valeur comme priorité des priorités en 2025 selon l'étude AgileBuyer - CNA. L'année achats 2025 sera bien rythmée à l'aune du triptyque équilibre économique, durabilité et diplomatie commerciale et les achats auront fort à faire pour éviter la fragmentation excessive des chaînes de valeur et une polarisation des intérêts. N'oublions pas, surtout pas, que malgré le report, les entreprises aux normes éthiques élevées, au clair dans leur vision, poursuivront leur stratégie de conciliation de la double matérialité dans un contexte de guerre (commerciale) qui s'annonce. La locomotive est lancée !