[Billet d'humeur] Les tontons flingueurs des achats
Publié par Evariste de Montalembert le - mis à jour à
A Montalembert, dans notre petit village d'acheteurs, on aime bien se réunir le soir au café, en buvant une liqueur étrange, auquel on trouve parfois un goût de pomme. Pour le coup, ceci nous permet d'évoquer ensemble nos glorieux ancêtres des achats : pas Lulu la Nantaise, ni Teddy de Montréal (« un fondu qui travaillait qu'à la dynamite »), mais d'autres personnes qui ont marqué la fonction sur les dernières décennies.
Pour le coup, on n'évoque pas les grands ancêtres : Kraljic (qui a gagné un tournoi de scrabble en étalant son nom sur la case « mot compte triple »), Pareto (qui a découvert que les pizzas étaient faites à 80 % de pâte et de 20 % de garniture)... Non, on parle surtout autour de cette liqueur de personnes de la fonction achats qu'on a bien connues, des praticiens quoi, qui prenaient tout comme nous le tracteur tous les matins pour aller labourer les champs. Dans nos campagnes, on leur donne de petits surnoms affectueux. À vous, ô lecteurs malicieux, de deviner de qui nous parlons (tout ceci n'étant qu'affabulation, humour et gaudriole, bien sûr).
Il y a d'abord eu Ignace (un petit nom charmant, comme disait Fernandel). Très tôt directeur des achats d'un grand constructeur automobile, il avait inventé à l'époque le concept de KPV2 (dans le texte : « Kontinuerliche Process Verbesserung Quadrat »). À quoi bon l'amélioration continue et tous ces concepts superflus, quand on peut faire la même chose au carré ? Pour le coup, il leur avait bien mis la tête au carré, à ses fournisseurs. Bon, dommage qu'il ait été ensuite poursuivi en justice quand il a quitté son employeur.
Gégé n'était pas mal non plus. Il a marqué la postérité de la fonction en France en scotchant des billets sous les chaises des participants d'un séminaire interne de sa direction achats, et en demandant à tous les acheteurs présents de les décrocher. Au final, tout le monde s'est levé, a récupéré les billets, et Gégé en a conclu : « vous voyez bien, pour faire de l'argent, il faut juste se lever le cul de sa chaise » (sacré Gégé, tu nous auras fait bien rire).
Philou-des-Bois (qui vole aux pauvres pour donner aux riches) est un petit rigolo aussi dans son genre : chargé de réduire les coûts en transférant les productions dans des pays à bas coûts, il a trouvé depuis son Chemin de Damas, et prêche maintenant pour la relocalisation. On apprécie énormément l'exercice de style au village...
Aimée, c'est un peu comme Lulu la Nantaise : elle a demandé à tout son comité de direction achats de passer sous les fourches caudines d'un coach pour savoir si leur profil psychologique était bleu, vert, jaune ou rouge. Pour le coup, ils se sont tous barrés, en se disant qu'ils préféraient les couleurs arc-en-ciel, et qu'après la pluie, le beau temps. Brillante conclusion !
Armand, c'était un type rigolo. Bon, c'est vrai qu'il a été arrêté pour accusation de fraude fiscale et de corruption... des broutilles au village ! C'est vrai qu'il avait de mauvaises habitudes, et tant qu'à faire en payant les factures en retard. Son patron Patoche en était tout marri. Allô, quoi ?
Alors, Ignace, Gégé, Philou-des-Bois, Aimée et Armand (à supposer que ça ait jamais existé, tout ça n'étant qu'humour et affabulation), c'est bien beau, mais on se dit quand même au village que ça ne donne pas nécessairement une super réputation de Montalembert,... Et on comprend mieux pourquoi l'office de tourisme n'affiche pas toujours complet auprès des Directions Générales.
Au village, on a trouvé la réponse : en proportion, il y a toujours autant de fous du village que chez d'autres... Mais il faut que ceci n'empêche personne de poursuivre son petit bonhomme de chemin, et avec détermination surtout. C.Q.F.D.