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Le vêtement professionnel, un outil de politique RSE

Publié par Fanny Perrin d'Arloz le | Mis à jour le

Support de l'image de l'entreprise, le vêtement professionnel symbolise la politique sociale d'un groupe, son éthique et ses valeurs. Son achat est loin d'être un acte anodin...

Le vêtement professionnel est l'un des rares produits qui peut déclencher une grève, met en garde Marc Jacouton, fondateur et président du cabinet RSE Développement. C'est tout sauf un achat facile car, au-delà du produit, on achète un service, un vecteur de communication, une logistique... " Le vêtement n'est pas seulement une affaire d'image. Il intègre de forts enjeux sociaux, économiques et environnementaux, qui peuvent venir écorner la notoriété d'une entreprise, s'ils n'ont pas été bien appréhendés en amont. Son approvisionnement de part et d'autre du globe impose de s'assurer que chacun de ses fournisseurs agit en conformité avec les réglementations en vigueur, notamment le Code du travail, et de façon respectueuse vis-à-vis de son écosystème. Cet achat nécessite de s'interroger sur le cycle de vie du textile, en valorisant au mieux son recyclage. " Toutefois, c'est davantage le choix de son fournisseur qui va faire de l'achat un acte responsable ou non ", soutient Marc Jacouton. Les acteurs du vêtement professionnel suivent cette tendance, imaginant et proposant des matières toujours plus respectueuses. C'est grâce à ses pratiques responsables sur les plans économique et environnemental que Cepovett, qui s'est vue décerner le premier Prix du fournisseur responsable 2013, entend se différencier de la déferlante asiatique depuis 2009. " Certains industriels vont, dans l'avenir, s'orienter vers l'utilisation de matières biosourcées : des polymères à base d'amidon sont ainsi en développement dans le nord de la France chez le groupe Roquette ", confie Jean-François Bracq, secrétaire général de Clubtex.

Un achat lourd de sens

Avant tout, le vêtement professionnel reste une ­tenue, qui doit satisfaire à des critères d'esthétisme et de confort et résulter d'un cahier des charges concerté. Il doit aussi inclure des phases-tests pour que les futurs porteurs deviennent acteurs de ce changement, si une nouvelle politique en matière d'images est notamment déployée par ce biais. " Acheter durable, c'est se diriger vers des ­matières responsables, privilégier des processus de fabrication plus respectueux de l'environnement, en évitant par exemple les superpositions inutiles de couches de matières, miser sur les filières de proximité et recycler son textile en fin de vie pour boucler la boucle ", résume Marc Jacouton.

Reste que ces matières écoresponsables, créatrices de valeurs RSE, ont tendance à alourdir la facture. En moyenne, un coton équitable coûte entre 10 % et 30 % plus cher qu'un coton conventionnel. " Une entreprise qui a l'habitude de faire fabriquer ses vêtements professionnels en polyester peut déjà évoluer vers du polyester recyclé et valoriser ce changement de matière ; une autre ayant recours au coton peut s'engager vers du coton bio équitable, suggère Marc Jacouton. Cela peut également s'inscrire dans une démarche transversale : ainsi, si la cafétéria de mon établissement propose du café équitable, je choisirai du coton équitable pour mes uniformes. " Choisir ces matières, dites nouvelles, est aussi " un moyen d'obtenir une garantie quant à la provenance des tissus ", d'après Céline Morel, consultante achats chez Sérénia.

Faire rimer respect des législations en vigueur et qualité du produit implique également d'arbitrer entre une filière de proximité, et notamment les usines de production au Maghreb culturellement assez proches des standards français, et une filière plus lointaine. La première a l'avantage de minimiser les risques en matière sociale, au détriment des coûts de production généralement plus élevés. " Si vous ciblez les pays plus lointains comme le Bangladesh ou la Chine, mettez en place un niveau d'audit suffisant et exigez une totale transparence de la part des industriels locaux ", prévient Marc Jacouton. Si toutes ces conditions sont réunies, le rapport qualité/prix/éthique peut ainsi être optimisé.

Autre option : la location

Pour lever quelques-unes de ces contraintes RSE, certaines sociétés font le choix de se tourner vers la location de leurs vêtements professionnels. " C'est un moyen de dédouaner les collaborateurs de l'entretien de leur vêtement professionnel et les entreprises de la collecte et de la gestion de leurs ­déchets, d'autant plus que des prestataires de location et d'entretien d'articles textiles comme Elis réfléchis­sent à des solutions pour offrir une seconde vie au textile ", explique Céline Morel. Rappelons-le, le coût de traitement de ces textiles en fin de vie peut avoisiner les 400 à 500 euros par tonne, selon les régions, montant auquel il faut ajouter la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). L'inconvénient de cette solution alternative : les vêtements sont généralement moins personnalisables en termes de style.

Témoignage
" Nous avons recyclé 15 tonnes de textile en fin de vie "
Hervé Renault, responsable achats à la direction
des achats France du groupe Accor
En 2011, Ibis décidait de renouveler sa garde-robe pour accompagner la transformation générale de la marque. " Les établissements étant certifiés ISO 14 001, le cahier des charges se devait, outre le fait de répondre à des enjeux de qualité, de style, d'esthétisme, de confort et de durabilité, d'être irréprochable en matière de management environnemental ", souligne Hervé Renault. C'est l'industriel Cepovett qui a été retenu pour sa collection et ses préconisations en matière de recyclage. " Les anciens uniformes avec le logo Ibis ont servi à la fabrication d'isolants thermiques et phoniques pour la filière automobile, les autres ont été revendus dans des friperies ", explique Hervé Renault. En parallèle, les salariés Ibis ont pu rapporter leurs vêtements personnels en fin de vie. " Au total, 15 tonnes de textile ont été collectées ", se réjouit Hervé Renault. En complément, Ibis a rejoint, durant l'été 2011, le programme international de reforestation solidaire "Arbre de vie, coton solidaire" et contribuait à planter 382 carapa procera au Mali, une essence d'arbre dont le fruit permet de générer une huile transformée en bio-pesticide pour la protection des champs de coton. Et si la nouvelle garde-robe identitaire d'Ibis, signée Cepovett et déployée en avril 2012, a obtenu l'adhésion de 98 % de ses hôtels, c'est en partie grâce au fait qu'ils ont été contributeurs du changement. " Une première phase d'essai a été testée pendant deux mois par une centaine de collaborateurs ", conclut Hervé Renault.
Ibis
Activité
Chaîne hôtelière
Groupe Accor Monde
160 000 salariés
Effectif acheteurs
et volume d'achats
NC
CA 2012 Accor
5 649 millions d'euros
Zoom
Du textile en fin de vie... à la pochette pour iPad !
Phone Régie a lancé, en février dernier, un programme de recyclage baptisé "Corporate -Upcycling", en association avec RSE Dévelop-pement et la créatrice de mode Sakina M'sa. Celui-ci consiste à transformer les textiles en fin de vie du leader français de l'accueil en entreprise en pochettes "éthiques et désirables" pour les tablettes iPad des commerciaux.

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