Quels sont les leviers des grands groupes dans leur collaboration avec des start-up ?
Publié par Magdalena Saczawa le - mis à jour à
Les grands groupes font face à plusieurs difficultés quand elles collaborent avec les start-up. Bpifrance souligne, dans son livre blanc, que le travail avec celles-ci permet aux grandes entreprises de gagner en compétitivité rapidement et de manière économique, tout en favorisant la croissance du chiffre d'affaires des jeunes pousses.
Selon l'étude de Bpifrance, les entreprises font face à de multiples perturbations d'ordre macroéconomique, environnemental, numérique et géopolitique, avec une instabilité internationale accentuée par la guerre en Ukraine. Cela entraîne une hausse significative des prix des matières premières et de l'énergie. L'inflation persiste et ne devrait pas diminuer avant 2024, malgré l'objectif des banques centrales de ne pas dépasser les 2 %. Les grandes économies de la zone euro ont même connu une récession technique, avec deux trimestres consécutifs de baisse du PIB. Depuis la crise du Covid-19, les entreprises font face à des crises d'approvisionnement successives et à l'inflation. Cela provoque une forte pression sur les fonctions d'achats qui se concentrent davantage sur la recherche de solutions d'approvisionnement à court terme pour sécuriser l'activité et maintenir les marges.
Les progrès technologiques tels que l'intelligence artificielle, le Web 3 et l'informatique quantique rendent la situation complexe. Les risques de "prise de contrôle" pourraient rendre obsolètes les technologies en place. Les entreprises doivent comprendre les avantages potentiels de ces nouvelles technologies émergentes et de les intégrer dans leurs opérations. Un appel est lancé pour utiliser le Hub Digital comme plateforme de sourcing de start-up françaises, afin de faciliter l'identification des meilleures solutions pour faciliter les prises de décision, sauvegarder, partager et contacter les start-up.
La place des achats dans un environnement complexe
Face à la volatilité des prix et aux avancées technologique, le rôle de l'acheteur est crucial dans la mise en oeuvre de la stratégie globale de l'entreprise. L'entreprise doit se poser des questions telles que la base de l'avantage compétitif de l'entreprise, la possibilité de transformer le modèle commercial, la capacité à développer une réponse interne, et surtout, comment renforcer la résilience de l'entreprise face aux crises et aux changements.
D'après Bpifrance, plus de 90 % des entreprises reconnaissent l'innovation comme le levier principal pour une croissance rentable et durable. Cependant, l'innovation interne seule ne suffit plus, et les entreprises les plus performantes sont celles qui réussissent à combiner les innovations internes avec celles provenant de sources externes, souvent assimilées à l'open innovation.
L'innovation externe implique la recherche et l'acquisition d'expertise extérieure, ainsi que l'analyse de l'environnement externe pour identifier, sélectionner, utiliser voire internaliser des solutions. Cela repose sur l'élargissement du panel de fournisseurs et la collaboration entre différents acteurs tels que grands groupes, ETI, PME, start-up, centres de recherche publics et privés, ainsi que des universités.
Augmenter l'innovation externe par le biais des achats
Le processus d'achat d'innovation va au-delà de la simple analyse des tendances du marché et du sourcing de solutions novatrices. Celui-ci englobe : la veille continue sur de nouveaux fournisseurs, produits, services et technologies.
Cela comprend également l'achat de prestations de R&D / R&I, le développement de partenariats avec des fournisseurs stratégiques de différentes tailles (grands groupes, ETI, PME, start-up), la collaboration avec des universités et des centres de recherche, l'organisation d'événements tels que des journées d'innovation fournisseurs ou des hackathons, l'animation de communautés d'utilisateurs externes pour comprendre les nouveaux usages et tendances, la mise en place de dispositifs contractuels pour protéger les clients internes et les partenaires d'innovation, la gestion d'écosystèmes externes variés, ainsi que la facilitation du processus de sélection des partenaires, de la prise de décision pour passer à l'échelle et des investissements.
Dynamiser l'image des directions achats
L'achat d'innovation offre des avantages significatifs pour les entreprises, allant au-delà de la simple compétitivité coûts. En favorisant l'innovation rapide, les entreprises accélèrent la mise sur le marché de nouveaux produits / services, ce qui améliore la profitabilité et contribue à la croissance. De plus, cette approche permet de réduire les risques d'approvisionnement et les problèmes liés aux fournisseurs, ce qui renforce l'agilité et la résilience de l'entreprise. Selon l'étude de Bpifrance, en attirant des talents et en améliorant la collaboration interne, l'achat d'innovation façonne une image dynamique des directions achats, axées sur la durabilité, la compétitivité et la croissance.
En élargissant la capacité d'innovation de l'organisation via le développement de son écosystème, cette pratique confère aux directions achats un rôle stratégique, les positionnant au-delà de l'optimisation des coûts, et les chargeant de contribuer activement à la compétitivité et à la croissance de l'entreprise.
Aligner les intentions stratégiques et opérationnelles grâce aux achats
Bien que l'innovation demeure une priorité stratégique au sein des entreprises, l'achat d'innovation reste souvent relégué au bas des priorités pour de nombreuses directions achats. La "veille de marché / technologie", cruciale pour la sécurité des risques et le développement de l'innovation, perd de son importance, ne figurant que dans 8 % des cinq priorités principales des achats.
Le décalage entre l'intention stratégique et la réalité opérationnelle trouve ses origines à la fois dans des facteurs internes à l'entreprise et dans des facteurs externes. Les obstacles internes comprennent l'ambivalence entre les objectifs stratégiques à long terme et les impératifs opérationnels à court terme, ainsi que le manque de ressources humaines, financières et technologiques. Les directions achats identifient des freins tels que la réorientation des priorités vers la sécurisation des volumes et des prix à court terme, le manque de ressources et de compétences pour structurer la démarche et collaborer avec les partenaires potentiels et les départements internes, ainsi que le manque d'outils pour capturer et analyser l'information de marché.
Concernant les facteurs externes comme les partenaires externes et en particulier les start-up, deviennent de plus en plus exigeantes envers les sociétés avec lesquelles ils collaborent. Les start-up privilégient les sociétés partageant des intérêts communs, déployant des ressources tangibles, offrant de la lisibilité sur les interlocuteurs, étant rapides dans leurs processus de décision et de collaboration, et évitant l'abus de position dominante en pratiquant des prix bas ou en multipliant les projets pilotes sans engagement contractuel. Afin de surmonter ces obstacles et concilier les objectifs stratégiques à long terme, incluant l'achat d'innovation, avec les impératifs à court terme, les directions achats doivent inévitablement repenser leur stratégie et leur modèle opérationnel.