"Lançez les appels d'offres! Envoyez les bons de commande ! Notifiez les marchés!"
Publié par Aude Guesnon le - mis à jour à
Le médiateur des entreprises lance cet appel à la solidarité, appuyé par Stéphanie Pauzat, vice-présidente déléguée de la CPME qui insiste: "Il est impératif de donner dès maintenant de la visibilité aux entreprises qui en ont besoin "pour conserver les emplois en interne".
"Le réflexe de toutes les organisations, grandes entreprises, collectivités et administrations, est de dire "on va stabiliser les choses en juillet/août et on relancera les projets en septembre"... mais c'est deux mois de chiffre d'affaires perdus pour les entreprises", a commenté Pierre Pelouzet lors d'un point presse organisé ce mercredi par la Médiation des entreprises. Et deux mois de chiffre d'affaires perdus, encore plus aujourd'hui, après la période que nous venons de vivre, est une perspective plus qu'inquiétante. Aussi le médiateur des entreprises lance-t-il un nouvel appel aux donneurs d'ordre: "Mobilisez-vous, n'attendez pas septembre pour lancer les appels d'offre. N'attendez pas septembre pour lancer des commandes. Il faut que les entreprises puissent remplir leurs carnets de commandes." Un appel à accélérer la relance économique, ainsi qu'un appel à la solidarité.
La relance constatée aujourd'hui, souligne Pierre Pelouzet, est essentiellement due à la reprise des chantiers mis en sommeil durant le confinement. Mais, souligne-t-il, il est impératif de donner dès maintenant de la visibilité aux entreprises qui, en ont besoin "pour conserver les emplois en interne", a souligné Stéphanie Pauzat, vice-présidente déléguée de la CPME. Laquelle a précisé craindre "un coup de massue" au dernier trimestre car les entreprises, qui ont jusqu'ici bénéficié des aides de l'Etat, mais qui sont essentiellement des reports, vont probablement faire face à des difficultés importantes.
Il s'agit là d'un nouveau cheval de bataille pour Pierre Pelouzet qui en chevauche bien d'autres... Le médiateur est déjà très investi en faveur de l'affacturage inversé qu'il pousse auprès des entreprises, ainsi qu'en faveur des achats responsables. "Une étude que nous avons menée avec l'Adra a notamment montré que les directions achats qui ont mis en place un programme d'achats responsables ont le sentiment de s'être mieux sorties de la crise que d'autres". (Lire notre article sur cette étude: Avec le covid-19, les achats deviennent plus stratégiques)
Les baux commerciaux, nouveaux objets de saisine
Si le nombre de saisines a un peu diminué depuis le déconfinement et la reprise des activités économiques - "les deux premières semaines de crise nous étions à 650 saisines par semaine et cela a duré pendant deux mois - nous en sommes aujourd'hui à 200 /300 par semaine" pour des motifs de délais de paiement non conformes, de rupture de contrats unilatérales ou de "demandes unilatérales" de baisses de prix, la médiation enregistre une "nouvelle distribution", comme l'a indiqué Pierre Pelouzet. De nombreuses saisines sont aujourd'hui faites par des secteurs d'activités nouveaux tels le commerce, l'hôtellerie et restauration ainsi que le service à la personne, pour des litiges portant sur les baux commerciaux, notamment.
Autre sujet qui complète aujourd'hui le quotidien du médiateur,- tout de même aidé par 86 médiateurs nationaux et régionaux - , les surcoûts dus aux mesures sanitaires sur les chantiers du BTP. "La question est toujours de savoir qui va payer ces surcoûts", a commenté Pierre Pelouzet. "En tant que médiateurs, nous aidons les entreprises à trouver des compromis." Sachant que ces surcoûts ne concernent que les chantiers engagés avant le confinement. Pour ceux à venir, "ces surcoûts seront intégrés dans les nouveaux appels d'offres".
Le témoignage d'un entrepreneur ayant fait appel à la Médiation
A l'occasion de ce point presse, Philippe Lafon, co-fondateur d'une startup qui exerce dans le domaine du logiciel, a témoigné de son expérience. L'entrepreneur a raconté avoir saisi la Médiation dans le cadre d'un contentieux qui l'opposait à un très gros donneur d'ordre, fin 2019. Alors qu'un contrat de 80 pages le liait à son client sur une durée de deux ans, ce dernier a tout à coup changé d'avis - "le besoin avait changé" - et annulé le bon de commande. Le conflit était installé. "Une semaine après l'intervention de la Médiation, raconte Philippe Lafon, la direction générale de cette entreprise était d'accord pour une rencontre. La médiation m'a permis de leur parler d'égal à égal et nous a aidés à construire un deal. Un mois et demi plus tard, tout a été réglé. Et maintenant, on refait du business ensemble! "
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