La Poste prend le pli des achats responsables
Publié par Emmanuelle Serrano le - mis à jour à
Karine Ondet, responsable du pôle " animation et méthodes ", direction Achats centrale au sein du groupe La Poste, fait le point sur la politique d'achats socialement responsables de son entreprise.
Sensibilisation, formation, outillage... Le pôle " animation et méthodes " de La Poste impulse et pilote la politique d'achats socialement responsables du groupe. En 2012, 2.3 millions d'euros ont été consacrés aux structures d'insertion par l'activité économique (SIAE). Une démarche en plein développement, qui s'accompagne de projets d'utilité sociale. La Poste et l'une de ses filiales, l'entreprise d'insertion Nouvelle Attitude, ont en effet lancé récemment une offre de services innovante liée à la collecte et au traitement des papiers de bureau.
Quels outils proposez-vous aux acheteurs du groupe pour favoriser les achats socialement responsables ?
Karine Ondet : Des formations sont régulièrement proposées, afin de permettre aux acheteurs des directions métiers (colis, courrier, bureaux de poste, etc.) ou filiales (la banque postale, Poste Immo, etc.) de monter en compétence sur la responsabilité sociale.
Des guides pratiques, adaptés à nos 42 familles d'achats, sont diffusés sur un site intranet. On y trouve notamment des recommandations en matière de critères à intégrer dans les consultations et de l'information sur l'existence ou non, dans ces familles d'achats, de fournisseurs responsables issus des secteurs du handicap et de l'IAE.
Enfin, nous avons la possibilité de déposer nos consultations d'achats directement auprès des structures, via le site de l'association d'acheteurs Pas@Pas dont nous avons été l'un des fondateurs.
Actuellement, quelles sont vos pratiques ?
Karine Ondet : Nous avons surtout recours au secteur de l'IAE pour des achats directs. Il nous semble important de pratiquer nous-mêmes les achats socialement responsables avant d'introduire de nouvelles pratiques auprès de nos propres fournisseurs.
Comme nous sommes soumis à la directive 2004/17/CE relative aux " secteurs spéciaux ", nous avons des obligations proches du code des marchés publics. Par exemple, nous ne pouvons pas réserver de marchés aux SIAE. Nous intégrons en revanche des critères RSE dans nos consultations qui permettent de prendre en compte la démarche responsable des candidats dans l'analyse multicritères conduisant au choix du " mieux-disant ". Par leur démarche sociale et aussi parfois environnementale, les entreprises d'insertion (EI) et les entreprises de travail temporaire d'insertion (ETTI) peuvent donc remporter plus facilement certains de nos marchés.
Pour quels types d'achats avez-vous recours au secteur de l'IAE ?
Karine Ondet : A l'heure actuelle, les plus gros marchés remportés par des SIAE sont pilotés par la direction du colis. Des EI sont en effet en charge de la réparation des conteneurs de tri et des charriots. Nous avons également une filiale, Poste-Immo, qui est régulièrement maître d'ouvrage de travaux de BTP. Là aussi, des EI sont en charge de l'installation de guichets automatiques à l'extérieur des bureaux de poste.
Mais nos achats directs au secteur de l'IAE concernent également la logistique, le traitement des déchets, le déménagement de locaux ou encore l'entretien des espaces verts. Nous faisons également appel à des ETTI pour nos besoins en intérim.
Enfin, il arrive que nous répondions à des marchés publics intégrant des clauses sociales. Dans ce cas, nous travaillons généralement avec des ETTI pour mettre en oeuvre les heures d'insertion.
Que vous apportent les SIAE par rapport à des fournisseurs " classiques " ?
Karine Ondet : Nos acheteurs mettent souvent en avant la souplesse des fournisseurs socialement responsables. Avec eux, nous ne sommes pas dans des process industrialisés. Les SIAE et les structures du handicap adaptent généralement leur offre de services à notre besoin.
La qualité est toujours au rendez-vous et l'achat socialement responsable ne coûte pas plus cher. Dans le secteur des espaces verts ou du traitement des déchets, les prix sont équivalents à ceux pratiqués par des entreprises classiques. Et puis, nous ne réfléchissons plus en " coût d'acquisition " des biens et des services. Il faut intégrer les coûts indirects des prestations liées par exemple à la logistique ou aux transports. Les SIAE, qui sont des entreprises locales, apportent des réponses concrètes aux stratégies achats articulées autour de la notion de coût global.
Vous avez développé avec une entreprise d'insertion une offre de services plutôt innovante...
Karine Ondet : Nous avions effectivement pour habitude de travailler avec l'entreprise d'insertion Nouvelle Attitude pour collecter et traiter nos papiers de bureaux. Au fur et à mesure, nous avons réfléchi avec elle au développement de services à forte plus-value sociale et environnementale auprès des PME que nous touchons tous les jours en leur livrant et collectant leurs courriers.
Pour mettre en place ce projet, nous avions un avantage logistique assez fort : une capacité de transport déjà existante. Aujourd'hui, les facteurs qui livrent et collectent le courrier peuvent ainsi repartir avec les papiers de bureaux à recycler !
Comment fonctionne cette offre de services avec Nouvelle Attitude ?
Karine Ondet : Nouvelle Attitude est devenue une filiale de La Poste et nous avons créé l'offre de services RECYGO. Nos facteurs collectent les papiers de bureau des PME intéressées. Nouvelle Attitude s'occupe du tri et du traitement des papiers de bureaux et les revendent aux papetiers locaux, qui manquaient de matière première pour fabriquer le papier recyclé.
Ce service est en cours de déploiement dans huit régions, où se situent nos hubs de tri du courrier. C'est une phase de développement importante pour Nouvelle Attitude.