Le plastique n'est plus fantastique
Publié par Eve Mennesson le | Mis à jour le
Bien que la crise sanitaire ait fait revenir en force le plastique jetable, la guerre se poursuit. Les entreprises doivent s'adapter pour proposer d'autres matières, ou passer au plastique recyclable. Une évolution qui se fait avec les fournisseurs : les achats sont donc en première ligne.
La crise sanitaire a fait ressurgir une autre pollution : le plastique jetable. Entre les masques en polypropylène, les gants en latex et la préférence des consommateurs pour les produits emballés (donnant une impression de sécurité sanitaire), le plastique redevient à la mode. Selon Elipso, l'association professionnelle représentant les fabricants d'emballages plastiques en France, la demande a augmenté de 20 à 30 % lors du premier confinement. Est-ce que cela veut dire que la guerre contre le plastique, initiée début 2020 avec l'interdiction de la vaisselle jetable et des cotons-tiges, va s'arrêter en si bon chemin ?
En effet, au 1er janvier 2021, ce devait être au tour des pailles, couverts, touillettes, couvercles de boissons, boîtes en polystyrène expansé, piques à steak et tiges pour ballons de disparaître. Puis, en 2023, des suremballages plastiques pour les fruits et légumes, des sachets de thé en plastique et des jouets en plastique distribués dans les fast-foods. Par ailleurs, dès l'année prochaine, un bonus-malus doit être mis en place pour limiter le suremballage plastique, et l'Europe a imposé la présence d'au moins 25 % de plastique recyclé dans les bouteilles en plastique PET transparent pour 2025, puis 30 % pour toutes les bouteilles pour 2030. Mais les fabricants de plastique peuvent tenter de faire revenir les gouvernements sur ces obligations. En effet, l'émission le Virus au Carré de France Inter rapporte que l'EuPC, l'European Plastics Converters, aurait envoyé un courrier à la Commission européenne arguant que que le plastique à usage unique était un matériau de choix pour assurer l'hygiène et la sécurité des consommateurs face au coronavirus.
Or, des chercheurs de l'Université de Hong-Kong ont prouvé que le virus n'était plus infectieux au bout de 3 heures sur du papier, au bout de 4 jours sur du verre et, dans certains cas, au bout de 7 jours sur du plastique ! Par ailleurs, le confinement a eu un impact sur la prise de conscience des consommateurs. D'après une analyse de Kantar, ils vont stopper leur ruée sur les produits de longue conservation, vont continuer à favoriser les produits locaux et les commerces de proximité, et les préoccupations environnementales des Français vont se confirmer. Les entreprises ne doivent donc pas arrêter leurs efforts vis-à-vis du plastique jetable, mais au contraire les poursuivre.
Cap sur la collaboration !
Ce qui veut dire que les entreprises doivent collaborer avec leurs fournisseurs sur ce sujet du plastique. En cette période chahutée, cela permet, de plus, de renforcer la relation autour d'un autre sujet que la gestion de la crise. Un sujet, de plus, tourné vers l'avenir : celui de la protection de l'environnement. Pourquoi ne pas proposer des "innovation days" autour de l'éco-conception, du plastique ; mais aussi de la biodiversité, de l'eau, etc. ? C'est l'occasion, pour les fournisseurs, de venir présenter des produits innovants dans ces domaines. L'objectif n'est plus de négocier le dernier centime, mais de co-innover. "La stratégie achats va passer d'un modèle transactionnel au partenariat", pense Christophe Durcudoy, associé chez Argon & Co. Un partenariat plus que nécessaire en cette période.
La collaboration est d'ailleurs la raison d'être de la nouvelle structure (RE)SET, créée par Géraldine Poivert, ancienne directrice générale de Citeo (résultat de la fusion d'Ecofolio et Eco-emballages). RE(SET) est une agence de conseil dans le domaine de l'économie circulaire qui fait travailler les entreprises en écosystème, c'est-à-dire avec leurs fournisseurs en amont, mais aussi avec les acteurs en aval, et ce dans une logique de business, décrit Géraldine Poivert, qui souhaite que les idées qui émergent changent l'activité de l'entreprise et ne soient pas cantonnées au domaine de la RSE. Le premier programme suivi par RE(SET) a fait collaborer Carrefour, Système U, Veolia et huit grands fournisseurs (de marques de distributeurs, mais aussi de packagings) sur la recherche d'emballages sans plastique.
Lire la suite en page 2 : Pénurie de plastique recyclé - La question de fin de vie des emballages - et, en page 3: l'interview de Rémi Rocca, directeur achats, environnement, qualité et logistique de McDonald's France: "Nous choisissons la meilleure technologie, en nous préoccupant en priorité de la question de la sécurité alimentaire" -